Laurent Philipparie
Actes Sud, 2025
Entre la commandante Catherine Novac et le capitaine Thierry Bar, on ne peut pas dire que ce soit le grand amour. A la veille de son départ en retraite, celui que Novac considère comme « le roi des emmerdeurs » lui donne encore du fil à retordre : en dépit des ordres qu’elle a formulés, Bar a entraîné ses hommes sur le théâtre de l’opération commando que s’apprêtent à mener les Servants de Gaïa, un groupe écoterroriste extrêmement actif. Furieuse, elle se rend à son tour sur place pour tenter de les intercepter avant que n’arrive un incident, voire une bavure. En vain. Le chef du mouvement périra dissous dans une cuve de soude de l’usine de savonnerie qu’il entendait saboter. Et lorsque Novac tente de mettre son subalterne devant ses responsabilités, celui-ci ne trouve rien d’autre à faire que de la décapiter avant de prendre la fuite…
Comme vous le voyez, ce polar démarre sur les chapeaux de roue et, jusqu’à la dernière ligne, ne se départit pas de ce rythme nerveux ménageant au passage de nombreux coups de théâtre. C’est dans un univers assez méconnu (me semble-t-il) qu’il nous plonge, celui de groupes de défense de l’environnement dans ses composantes les plus radicales et les plus violentes. Ceux pour lesquels la protection de l’espèce animale ou la préservation des ressources naturelles justifient une action ultraviolente pouvant aller jusqu’à l’atteinte à la vie humaine.
On est loin ici des actions de désobéissance civile ou d’occupation de sites tels que le chantier de Sainte-Soline. On a affaire dans ce roman à des fanatiques clairement présentés comme tels, des membres de groupuscules s’apparentant davantage à des sectes qu’à des mouvements ayant un fondement politique. Ceux-ci existent-il réellement ? C’est bien possible, quoique je n’en aie pas moi-même connaissance, ne m’étant pas particulièrement intéressée à la question. Le fait que l’auteur, Laurent Philipparie, soit lui-même criminologue et commandant de police, peut néanmoins inviter le croire. S’est-il en effet appuyé sur son expérience professionnelle, rappelée en quatrième de couverture, pour construire son roman ? On ne peut s’empêcher de se poser la question.
Quoi qu’il en soit, l’auteur fait assaut de rebondissements tellement effarants, avec une multiplicité de personnages à l’identité si trouble, qu’il ne me semble pas ouvrir la porte à un amalgame entre les mouvements qu’il met en scène et ceux d’une autre nature qui font parfois la une des médias et que d’aucuns s’empressent pourtant de qualifier d’écoterroristes. Il invite en revanche à s’intéresser de plus près aux diverses formes que peut revêtir ce type d’activisme. D’un point de vue plus formel, l’auteur fait place à un remarquable sens du suspens et sait parfaitement créer la surprise. Des qualités particulièrement appréciables lorsqu’il s’agit de polar !