L'encre et le sang
Franck Thilliez & Laurent Scalese
Pocket 2013
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L'idée de départ de ce polar fantastique - une machine à écrire qui donne vie à tout ce que son propriétaire imagine en l'utilisant - donne lieu à un texte impeccablement construit, qui aurait largement gagné à être développé.
Ces quelque 120 pages à l'efficacité redoutable se lisent d'une traite. Certes, on est aidé par la faible pagination. Mais ce n'est bien entendu pas la seule raison.
La construction de cette nouvelle, variation sur le mythe de l'écrivain démiurge, est d'une implacable rigueur.
Un écrivain ayant été dépossédé de son œuvre trouve une machine à écrire qui lui permet de rendre réelles toutes les productions de sa fertile imagination. Il tient ainsi la clé de sa vengeance et peut désormais façonner le monde selon ses caprices.
Mais que va-t-il faire d'un pouvoir aussi vertigineux ? Et peut-on vraiment tout maîtriser par la seule vertu du Verbe ?
On ne peut que reconnaître la qualité de la trame narrative. On sait gré aux auteurs de ne pas décrire les scènes de violence gratuite imaginées par le héros dont il nous est dit que la cruauté est sans limite. Le scenario est admirablement construit et le retournement final est tout à fait brillant.
Mais les auteurs vont droit au but. Trop. Il me semble que ce court roman aurait gagné à être étoffé pour donner plus de chair aux personnages et accroître le sentiment d'étrangeté. L'ivresse et l'attrait de la domination que peuvent procurer un pouvoir aussi démesuré ne sont pas suffisamment développés. Même si on est dans le domaine du fantastique, et peut-être justement pour cette raison, on demande à être arraché à ses repères pour entrer dans un autre univers. Or le récit va trop vite pour que cela soit rendu possible.
En dépit des indéniables qualités de ce récit, je suis un peu restée sur ma faim.
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