lundi 17 juin 2024

L’Aigle et la Rose

Serge Hayat
L’Observatoire, 2024


Même si, à titre personnel, je ne connais pas dans le détail l’histoire de Napoléon, on sait généralement que Joséphine tint à ses côtés un rôle non négligeable. Il faut croire que la nature de leur relation devient un objet d’attention, sinon d’étude, particulièrement en vogue aujourd’hui puisqu’elle était déjà au coeur du dernier film de Ridley Scott sorti l’année dernière et qu’elle occupe la place centrale du roman de Serge Hayat.


L’action se concentre sur quelques heures - que l’on peut imaginer déterminantes - et pour l’essentiel dans un lieu clos d’où l’on ne s’échappera qu’à la fin du roman et à l’occasion de quelques rappels du passé. Le livre s’ouvre le 13 octobre 1799 à 13h30 au palais du Luxembourg, où Paul Barras a ses appartements. Bonaparte, qui a quitté le commandement de la campagne d’Egypte sans aucune autorisation, est de retour sur le sol français et va reparaître à Paris d’un jour à l’autre. Barras est conscient de la menace que cela représente : le Directoire, dont il est l’un des membres les plus influents, est de plus en plus contesté, tandis que la popularité de Bonaparte ne cesse au contraire de croître. Celui que Barras soutint pour asseoir sa propre position pourrait aujourd’hui devenir l’artisan de sa chute. Il doit donc de toute urgence établir une stratégie lui permettant de contenir les ambitions du jeune général. Et pour cela, il possède un atout maître : Joséphine. 


Ainsi, en quelque quatre jours, Bonaparte, Joséphine et Barras vont-ils se croiser et jouer une partie de billard à plusieurs bandes… dont nous connaissons l’issue. Mais en nous offrant l’occasion d’entrer dans l’intimité d’un couple qui deviendra bientôt impérial et en nous livrant un dialogue qui pour être imaginaire s’appuie sur des fondements historiques, Serge Hayat nous permet de comprendre ce qui s’est joué à un moment crucial de basculement historique : celui de la fin du Directoire et du coup d’Etat du 18 Brumaire.


Construit comme une pièce de théâtre, avec un dispositif s’apparentant à une unité de temps et de lieu, un nombre réduit de personnages et une intrigue resserrée autour des liens qui les unissent, ce texte se lit avec aisance et intérêt. Il est accessible même au lecteur le plus ignorant de l’histoire napoléonienne, qui en ressort incontestablement instruit. Mais cette manière d’aborder l’histoire par les secrets d’alcôve permet-elle vraiment de prendre de la hauteur et de saisir tous les enjeux alors à l’oeuvre ? Je m’interroge… 


Reste que les échanges entre les protagonistes ne manquent ni de saveur ni sans doute de pertinence et que j’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce roman qui m’a permis d’accroître un tout petit peu ma connaissance de l’histoire de France. C’est déjà beaucoup !



Merci aux Editions de l'Observatoire et à Nicole, dont je vous recommande le billet, qui a organisé le concours dont j'ai été l'une des heureuses bénéficiaires !


5 commentaires:

  1. Bonne question. Peut-être que ce roman ne se veut qu'un divertissement plus qu'un essai historique.

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    1. La forme est celle d'une fiction ; pour autant, le fond semble tout à fait sérieux et historiquement juste. C'est vraiment l'angle qui est inattendu, mais ce mélange de l'intime et de l'Histoire fonctionne, et c'est assez convaincant.

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  2. Eh bien je suis contente si l'escapade t'a plu. Pour ma part je pense que le récit est suffisamment documenté pour que l'on prenne au sérieux cette plongée dans les coulisses-alcôves dont on a pu expérimenter l'importance et l'influence dans les grandes décisions. Même si le romanesque est ici hautement revendiqué.

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    1. Oui, ça semble très sérieux. Et j'ai pris beaucoup de plaisir à le lire... en dépit de ma relative perplexité !

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  3. "construit comme une pièce de théâtre" me suffit déjà :) Mieux que le "choc des savoirs" apparemment......

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