Nicolas Mathieu
Actes Sud, 2018
Prix Goncourt 2018
Voici un livre qui suscite un certain engouement et qui se retrouve dans les sélections de quelques prix littéraires, parmi lesquels le plus prestigieux d’entre eux, le Goncourt. Roman à coloration sociale, dont l’action se situe dans la France des années 90, il possédait d’évidents atouts pour m’intéresser.
Intéressée, je l’ai été. Séduite, je n’irais peut-être pas jusque-là.
Découpé en trois parties correspondant à trois périodes de la décennie, d’août 1992 à la coupe du Monde de football de 1998, le roman relate la vie d’adolescents dans l’est du pays, là où les hauts-fourneaux ont cessé toute activité, où les zones pavillonnaires côtoient les citées bétonnées, où les perspectives d’avenir se réduisent comme peau de chagrin.
Lorsque s’ouvre le roman, les héros ont de 14 à 16 ans. C’est l’été, les jeunes gens traînent leur désoeuvrement des bords d’un lac aux soirées organisées ça et là. On fume des pétards, on boit des bières, on s’observe... On commence à ressentir du désir, on se sent maladroit, on se pose d’innombrables questions... Pas encore sur son avenir, mais plutôt sur la manière d’embrasser, sur ce qu’on va faire le lendemain ou encore sur le moyen d’échapper aux remontrances des parents. Des préoccupations classiques d’ado, en somme. Ce pourrait être léger et pourtant ça ne l’est pas. On sent d’emblée un poids, une chape, une ambiance un peu poisseuse qu’accentue la canicule qui s’abat alors sur la région...
Nicolas Mathieu a choisi d’opérer des ellipses temporelles au sein de son récit. Lorsqu’on retrouve les protagonistes, deux années se sont écoulées, que l’on devine à la fois exemptes d’événements saillants, mais pourtant lourdes d’une inertie qui entraîne malgré soi vers une morne existence. Déjà, ces ados se fanent, se voient ressembler bientôt à leurs parents, sans véritable issue pour y échapper.
Deux ans plus tard encore, malgré l’exaltation que suscitent les victoires des Bleus, l’horizon s’est définitivement refermé. Tout est joué, plié. Ils n’ont pas 20 ans et sont pris dans les même rets que leurs aînés. Ils ont à leur tour un crédit, un maigre salaire... et des enfants qui reproduiront sans doute la même histoire.
Nicolas Mathieu offre une vision assez crue de cette jeunesse sans perspectives qui a succédé aux générations des Trente Glorieuses, une vision réaliste et sans excès de dramatisation, ce qui en fait toute la valeur. Pourtant, de là viennent peut-être mes réserves. Jamais je n’ai ressenti d’empathie, ou ne serait-ce qu’un peu d’attachement pour les personnages. Je suis pour ma part restée à distance de ce texte d’un bout à l’autre de ma lecture. Mais était-il possible d’en être autrement avec un tel sujet, aussi peu épique que possible ? Pour avoir lu d’autres récits de la même veine, il me semble que oui...
Il n’en reste pas moins que ce roman digne d’intérêt me paraît être un excellent candidat pour le Goncourt : un sujet bien ancré dans nos préoccupations actuelles, un style tout à fait honnête sans être révolutionnaire, une pagination généreuse mais pas au point d’en devenir effrayante... Rappelons tout de même que l’éditeur a déjà raflé la mise l’an dernier, ce qui pourrait jouer en sa défaveur. Réponse dans quelques jours !
Je viens de le finir... mon avis dans une quinzaine si je maintiens mon rythme d'écriture. ;-)
RépondreSupprimerMais pourrait-on avoir ici un petit avant-goût ? ;-)
SupprimerJe pense que c'est lui que je suis en train d'écouter sur France-Culture .. Je lis beaucoup de billets positifs, mais pour l'instant, je ne suis pas tentée. Surtout si tu ne t'es pas attachée aux personnages, c'est gênant pour moi.
RépondreSupprimerEffectivement, les avis sont très positifs. Mes réserves sont toutefois relatives, car le tableau est tout à fait juste.
SupprimerJe viens de me l'offrir il y a peu, curieuse je dois dire...! Je retiens tes bémols et je me lance bientôt ;-)
RépondreSupprimerEh bien, j'attends ton retour :-)
SupprimerJe partage tes bémols. Moi aussi je suis restée à distance et il ne me reste pas grand chose de cette lecture...
RépondreSupprimerOn verra sur le long terme. Mais je doute que cette lecture laisse en moi une empreinte profonde et durable... Une fois de plus, nous nous retrouvons :-)
SupprimerJ'ai écouté (en partie) la même émission de France culture hier... Il y avait aussi un autre auteur dont on parle beaucoup.
RépondreSupprimerCelle qu'a écoutée Galea ? Je vais essayer de trouver un moment pour la podcaster. Je suis certaine que Nicolas Mathieu est un auteur intéressant à écouter.
Supprimerça me tentait mais je suis en train de lire Les Garçons de l'été et j'avoue que le thème des ados en perdition commence à me lasser...
RépondreSupprimerTu pourras toujours le lire un peu plus tard... rien ne presse.
SupprimerDepuis le début je n'ai pas envie de le lire malgré le bien que j'en entends... mais le thème ne m'attire pas alors je crois que je ne vais pas me forcer ;-)
RépondreSupprimerNon, en effet... D'autant que quelque chose me dit que tu ne manques pas de lectures... :-)
SupprimerJe le vois partout, et il ne m'attire absolument pas ...
RépondreSupprimerDans ce cas, il ne faut pas insister...
SupprimerPas d'attachement pour moi non plus et une vision parfois condescendante de certains personnages qui m'a gêné à de nombreuses reprises. Bref pas le coup de coeur attendu en ce qui me concerne.
RépondreSupprimerTu viens de le finir ? Je n'ai pas vu passer ta chronique...
SupprimerComme toi, au vu de tous les éloges, j'attendais un coup de coeur... qui ne s'est pas produit.
J'avais très envie de le lire pour le côté social qu'avait déjà son roman précédent. Je dois avouer que la remise du Goncourt aiguise encore plus ma curiosité !
RépondreSupprimerC'est sûr que là, ce livre qui rencontrait déjà un certain succès devrait rencontrer un très grand nombre de lecteurs.
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