Fabrice Humbert
Gallimard, 2017
Voici un roman que j’avais très envie de lire, tant j’avais été impressionnée par un précédent titre de Fabrice Humbert, La fortune de Sila. Entendez par là que j’avais été assez éblouie par la construction de son récit et plus encore par l’aura qui se dégageait de son personnage principal.
J’avoue que le titre de ce nouvel opus m’intriguait. Comment vivre en héros ? Non pas pourquoi ou peut-on, ou même doit-on vivre en héros, mais bien comment, indiquant ainsi un singulier postulat de départ. Ne m’étant moi-même jamais pensée comme une héroïne, je me demandais vraiment ce que recelait ce récit...
Poussé par son père, ancien résistant et grand admirateur de Marcel Cerdan, Tristan Rivière dut se mettre à la boxe dès son plus jeune âge. En dépit de son naturel plutôt peureux et de son peu de goût pour les combats, il se révéla plutôt doué, aussi son entraîneur, Bouli Damiel, se prit-il de sympathie pour lui.
Sur le ring, Tristan parvenait à dominer sa peur et à se composer un masque impassible. Mais le jour où Bouli, passablement éméché, vient chercher des noises à trois brutes dans le métro, Tristan prend ses jambes à son cou et le laisse se faire casser la figure en solo. Bouli sortira du coma, mais Tristan ne se relèvera pas de ce moment de faiblesse qui lui révéla sa véritable nature. Ces quelques instants dévièrent ainsi le cours de son existence, comme, plusieurs années plus tard, quelque trente-huit secondes suffirent à l’inverser de nouveau, lorsqu’une situation similaire se reproduisit. Tandis qu’il était dans un RER, une jeune femme se faisait brutalement alpaguer par une poignée de jeunes hommes qui allaient de toute évidence la violer. A la faveur d’un arrêt, alors que personne ne réagissait au sein du wagon, Tristan, redoutant de vivre à nouveau une situation qu’il n’est jamais parvenu à régler, l’entraîne à l’extérieur juste avant que les portes ne se referment. Trente-huit secondes, c’est le temps qui s’écoula entre le moment où il s’élança et celui où il arrêta sa course effrénée pour regarder la jeune personne qu’il venait de sauver... et qui allait de venir sa femme. Trente-huit secondes qui changèrent donc sa vie.
Le narrateur qui observe et rapporte tout cela ne se prive pas d’interrompre régulièrement le récit pour évoquer les différentes possibilités qui s’offrent aux personnages et rappelle, à travers l’évocation du passé du père de Tristan, que certaines périodes, certains contextes, conduisent inévitablement les individus à révéler ou non leur nature héroïque.
Fabrice Humbert scrute ces moments brefs mais décisifs de l’existence qui peut prendre un cours ou au autre bien différents selon la voie que l’on emprunte. Ce n’est pas seulement une question d’acte, mais surtout ce que ces choix nous révèlent à nous-mêmes et de nous-mêmes qui les rendent décisifs.
En soi, la réflexion n’est pas inintéressante, et le roman est plutôt agréable à lire. Cependant, le caractère très appuyé de la démonstration et la posture morale qui transparaît m’ont un peu gênée, voire laissée sur ma faim. Le traitement du propos manque un peu de profondeur pour être vraiment convaincant. Autant il y avait de la puissance et de la lumière dans La fortune de Sila, autant ce roman m’a semblé plus poussif.
Il n’en demeure pas moins que la plume de Fabrice Humbert est d’une fluidité qui rend la lecture plaisante. J’attends donc le roman dans lequel il retrouvera sa véritable puissance romanesque...
C'est vrai qu'il est moins puissant que les précédents mais l'humour qui s'en dégage lui donne un charme particulier, je trouve. J'ai beaucoup aimé !
RépondreSupprimerAh, c'est drôle (si je puis dire), je n'ai pas particulièrement perçu d'humour. Ceci étant dit, encore une fois, la plume d'Humbert est très agréable à lire, et je ne me suis pas ennuyée.
SupprimerJ'ai lu les deux premiers de l'auteur avec grand plaisir. J'ai du retard maintenant dans ses parutions, il va falloir que j'y remédie.
RépondreSupprimerMais oui, c'est toujours agréable de retrouver un auteur qu'on a aimé. Je serais très curieuse de savoir ce que tu penserais de celui-ci...
SupprimerA relire l'avis que j'avais écrit après l'avoir lu, je me rends compte que nos avis sont très différents. J'ai aimé la description de l'engrenage que provoque le mensonge que fait l'auteur et cela m'a fait réfléchir sur nos héros actuels. Voir vagabondageautourdesoi.com
RépondreSupprimerJe vais aller lire ça :-)
SupprimerJ'avais aimé La fortune de Sila et L'origine de la violence... je me sens moins motivée pour lire celui-ci.
RépondreSupprimerJe pense que je reste sur l'éblouissement que j'ai ressenti à la lecture de La fortune de Sila. Le héros avait une part de mystère et une dimension christique qui en faisaient justement un héros hors du commun. Encore une fois, même si le roman est égréable à lire, je le trouve trop démonstratif.
SupprimerJe le finis tout juste, j'ai adoré le début, mais j'ai eu des moments des hauts et des bas dans le reste du roman. Globalement, j'ai apprécié mais j'ai largement préféré L'origine de la violence ou encore Avant la chute, sur des thèmes plus sérieux, plus profonds.
RépondreSupprimerL'origine de la violence est un titre que je voudrais vraiment lire, un de ces jours...
SupprimerAh, j'avais envie de le lire (je n'ai rien lu de lui encore...)... je crois que je tenterai quand même, le thème m'intrigue.
RépondreSupprimerAh franchement, si tu dois faire connaissance avec l'auteur, je te conseille vraiment La fortune de Sila. (je te mets le lien, je m'aperçois que j'ai oublié de le faire dans l'article). Ceci dit, je serais curieuse d'avoir ton avis sur ce titre :-) http://delphine-olympe.blogspot.fr/2014/04/la-fortune-de-sila-fabrice-humbert-le.html
Supprimerj'hésite... je n'ai rien lu de l'auteur et peut-être que La Fortune de Sila m'irait mieux? On verra si le roman croise mon chemin:) ...
RépondreSupprimerOui, La fortune, de mon point de vue, c'est plus sûr...
SupprimerCe n'est donc pas par ce titre-là qu'il faudra que j'aborde l'auteur !
RépondreSupprimerDisons que je pense qu'il en a écrit de meilleurs...
SupprimerJ'ai été déçue dernièrement par cet auteur, donc je ne pense pas le relire. Je n'ai pour ma part jamais vu chez lui de puissance romanesque justement :(
RépondreSupprimerQu'as-tu lu de lui, Corentine ?
SupprimerL'origine de la violence et Eden Utopie. Autant j'avais apprécié le premier, mais le second... pas du tout !
SupprimerJ'avais adoré son premier roman L'origine de la violence, mais depuis il ne cesse de me décevoir, même si j'aime beaucoup sa plume, je ne vais donc pas me précipiter sur celui-ci.
RépondreSupprimerC'est sûr que je ne vais pas t'y pousser... Il faudrait que je lise L'origine de la violence.
SupprimerJe pense avoir lu tous les romans de cet auteur (Eden Utopie m'a particulièrement intéressée), celui-ci est l'une de mes prochaines lectures, je l'ai reçu dans le cadre des matchs de la rentrée littéraire.
RépondreSupprimerAlors, évidemment, lis celui-ci si tu es inconditionnelle de l'auteur. Je guetterai ton commentaire avec intérêt.
SupprimerDommage, j'avais comme toi beaucoup aimé "Le fortune de Sila".
RépondreSupprimerBon, après ça reste mon avis personnel... Peut-être l'aimerais-tu davantage que moi.
SupprimerLu sans fatigue, (mais pas de billet, quelle paresse, )
RépondreSupprimer"Lu sans fatigue" : pas d'enthousiasme délirant, a priori... Je me trompe ?
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