Tonino Benacquista
Gallimard, 2025
Je me fais toujours une fête de lire un nouveau livre de Tonino Benacquista, même si depuis quelque temps les réactions qu’il suscite en moi fluctuent entre exaltation et désappointement. Après une remarquable incursion dans le récit autobiographique, l’écrivain clame son retour à la fiction avec un titre sans équivoque : Tiré de faits irréels.
Il nous plonge même au coeur de la fabrique fictionnelle en relatant le parcours d’un éditeur de littérature désormais à la veille d’entrer en liquidation judiciaire. Bertrand Dumas évoque ses différents auteurs, se remémore certains épisodes de sa carrière, quelques-unes de ses expériences parmi les plus cuisantes ou les plus éclatantes et fait le constat d’un glissement de la profession vers une financiarisation qui lui est préjudiciable - ce qui, évidemment, n’a pas manqué de m’interpeller : les pages que Benacquista consacre au portrait d’un milliardaire en quête d’une maison d’édition à acquérir sont de loin celles que j’ai préférées ! (Toute ressemblance avec des personnages ou des faits réels ou ayant existé, etc.)
Elles n’auront pourtant pas suffi à emporter mon enthousiasme. D’abord parce qu’au-delà de la succession de saynètes - certes plaisantes - dont on ne perçoit pas toujours la cohérence de l’enchaînement, le récit peine selon moi à trouver une réelle assise. Ensuite parce que Benacquista s’amuse beaucoup à brouiller les lignes entre les souvenirs « réels » de son héros et le récit que celui-ci en restitue, si bien que l’on finit par être un peu perdu. Certes l’auteur est d’une grande habileté puisque c’est là le but recherché. Son héros se laisse insensiblement entraîner dans un espace narratif aux contours de plus en plus flous, et l’on finit par se demander si l’on n’est pas entré dans une fiction secondaire, sans vraiment pouvoir identifier le moment où les choses ont basculé. C’est amusant et même assez bluffant, mais comme il arrive parfois lorsqu’un artiste fait preuve de virtuosité, on est plus admiratif de sa technicité que touché par la puissance de son oeuvre.
Il en a maintes fois fait la démonstration, Benacquista possède un imaginaire d’une richesse infinie et maîtrise comme personne l’art de raconter les histoires. Mais à l’instar des prestidigitateurs qui nous éblouissent par la qualité de leurs tours, il ne doivent rien laisser entrevoir de leurs secrets de fabrication, sous peine d’abolir l’émerveillement…
Je suis un peu frileuse depuis ma dernière incursion qui fut une déception (Toutes les histoires...), j'ai fait l'impasse sur l'autobiographie et là... je ne sais pas... Tes réserves ne vont pas m'encourager.
RépondreSupprimerMoi non plus, je n'avais pas été emballée par Toutes les histoires... Mais l'autobiographie était en revanche vraiment très bien. Malgré le fait qu'il soit devenu à mes yeux plus inégal, je garde une vraie tendresse pour cet écrivain.
SupprimerJ'ai beaucoup lu -et apprécié- cet auteur il y a une vingtaine d'années. Y revenir serait visiblement une bonne idée...
RépondreSupprimerMais oui ! Tu as dû rater quelques sacrés textes... ;-)
SupprimerJe n'ai pas eu l'occasion de lire cet auteur jusqu'à présent et pourtant à une époque on le voyait beaucoup sur les blogs.
RépondreSupprimerJamais lu ? C'est dommage, il a écrit quelques romans vraiment fabuleux !
Supprimerraaaahhh, moi aussi j'adore/j'adorais cet auteur qui est capable de merveilles. Il continue à se fatiguer (à nous fatiguer?) alors...
RépondreSupprimerA nous fatiguer ? Pourquoi ça ?
SupprimerA n'être plus aussi performant que jadis :) J'avais trouvé "Toutes les histoires d'amour..." tellement confus et décevant !
SupprimerJ'avais adoré les premiers romans de cet auteur. Mais les suivants m'avaient déçu.
RépondreSupprimerJe ne sais pas à partir de quel moment il a commencé à te décevoir. Quoi qu'il en soit, je te recommande vraiment Porca Miseria, son texte autobiographique.
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