mardi 21 mai 2019

Salina


Laurent Gaudé

Actes Sud, 2018



De Laurent Gaudé, je n’avais jusqu’à présent lu que le magnifique Soleil des Scorta. Aussi, lorsque ne sachant trop quoi lire, je suis tombée sur son dernier roman à la bibliothèque, je me suis dit que c’était peut-être le livre qu’il me fallait en ce moment : bref, d’une écriture finement ciselée, il ne laisserait pas place à la lassitude, même si ce qu’indiquait la quatrième de couverture pouvait me laisser penser que cette oeuvre était assez éloignée de mon champ de lecture habituel...

J’y ai retrouvé ce qui m’avait semblé faire la singularité de l’auteur et que j’avais apprécié  dans le titre qui lui avait permis jadis de remporter le prix Goncourt : une forme d’épure dans l’écriture, une économie de moyens permettant d’aller à l’essentiel, au coeur des sentiments humains ; le talent à dresser d’emblée un décor et une atmosphère, rude, âpre, et à écarter toute espèce de détail qui diluerait le récit et en amoindrirait la force ; des personnages puissants, dans lesquels s’incarnent des types de caractères humains, à l’instar des héros antiques. 

Et c’est bien une manière de conte, ou de récit ancestral, mythique, de ceux qui se transmettaient oralement que nous offre aujourd’hui Laurent Gaudé. 

A travers la tragique destinée de Salina, vouée dès sa naissance au malheur, l’auteur déroule la vie d’une femme qui dut se soumettre à la loi du clan auquel elle appartenait, et recevoir le mari qui lui fut imposé. Une vie qu’elle subit mais n’accepta jamais et qui décida du sort des trois fils qui lui furent donnés, et que le plus jeune d’entre eux raconte au moment de l’accompagner vers le repos que lui offre enfin la mort.

Si j’ai été conquise à nouveau par le style, j’avoue que le récit m’a en revanche laissée plus sceptique. Dans Le soleil des Scorta, les personnages s’inscrivaient dans une terre, dans une communauté qui commandaient leur existence. On était dans dans un lieu parfaitement circonscrit, le sud de l’Italie, et à travers ses héros, Gaudé me semblait dépeindre un peuple et son viscéral attachement à une terre. Et c’est ce que j’avais aimé. Ici, quoique l’on puisse imaginer être quelque part en terre africaine, l’univers a une dimension qui se veut plus universelle, plus primitive, et c’est pourquoi sans doute j’en suis restée plus à l’écart. Mais je crois vraiment que c’est une question de sensibilité personnelle et je ne doute pas que ce texte aux indéniables qualités littéraires ait trouvé son public.






10 commentaires:

  1. Certains des romans de Laurent Gaudé ont effectivement un côté conte universel qui peut empêcher d'y adhérer. pour moi, ça avait bien fonctionné avec Pour seul cortège, mais pas avec La mort du roi Tsongor.

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    1. C'est vrai que c'est une forme à laquelle je suis un peu rétive. Ce qui est dommage, en l'occurrence, car je trouve l'écriture de Gaudé très belle.

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  2. C'est un auteur dont les histoires de m'attirent pas. Je le regrette parce que j'aimerais bien découvrir son style. Ça viendra peut-être. Aifelle.

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    1. Oui, d'autant qu'il s'illustre dans différents registres...

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  3. J'adore Gaudé. Et je me suis promis de ne pas ressortir de mon prochain passage en librairie sans ce titre sous le bras.

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  4. J'accroche rarement au côté conte, fable type Véronique Ovaldé, même si l'écriture est belle. J'ai Eldorado de cet auteur dans ma PAL depuis des lustres mais je n'arrive pas à franchir le pas. Ton billet ajoute encore un peu d'incertitude sur cet auteur ;-)

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    1. Du coup, je te conseille plutôt la lecture du Soleil des Scorta.

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  5. Celui-ci m'attend. En revanche, je viens de terminer "Nous, l'Europe" du même auteur et gros Boum. De la poésie en vers libres et surtout un très très beau (r)appel.

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    1. Oui, j'ai vu qu'il venait de sortir ce texte, mais je n'en sais pas plus. J'irai lire ton billet quand tu le publieras ;-)

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