mardi 10 mai 2022

Mères

Théodora Dimova
Editions Syrtes Poche, 2019

Traduit du bulgare par Marie Vrinat



’instinct maternel dont on nous rebat si souvent les oreilles, ça vous parle ? Eh bien voici un petit livre qui lui en met un grand coup dans l’aile ! Sept histoires nous y sont relatées, celle de sept enfants grandissant dans la Bulgarie post-communiste, sept enfants étudiant dans le même lycée et qui ont noué une étroite relation de confiance avec leur professeure principale prénommée Yavora.


On découvre l’un après l’autre le contexte familial dans lequel vivent ces adolescents avant d’entendre la déposition qu’ils sont sommés de faire et dont on ne sait pas précisément si elle est formulée devant un représentant de la police ou devant un psychologue. Mais ce qui est clair, en revanche, c'est qu’un mystérieux drame les unit. 


A travers ces récits, c’est toute une société qui nous est dépeinte, celle d’un pays qui, en s’ouvrant à l’économie libérale, a vu naître une oligarchie mafieuse, la corruption s’étendre et le chômage sévir, d'où émerge néanmoins une classe moyenne mais où l’extrême pauvreté et la précarité sont devenues légion. C’est un pays où le hiatus peut très vite se creuser entre des parents nés dans un système socialiste et des enfants grandissant dans un monde différent, avec pour tous des repères brouillés et des perspectives difficilement perceptibles. 


Comment, dans ce contexte, assumer sa maternité ? Accompagner son enfant lorsqu’on est contrainte de partir travailler à l’étranger, que l’on a sombré dans une profonde dépression, que l’on a soi-même connu de violents traumatismes dans sa propre enfance ou que l’on a le sentiment d’avoir été dépossédée de sa propre existence ? 


Etonnant récit, dont le rythme effréné qui happe le lecteur pour le rendre captif de ces univers souvent étouffants contraste avec l'atmosphère fantasmagorique des pages consacrées à Yarova, ce personnage surnaturel incarnant une sorte de vie rêvée, d’idéal inaccessible. On sera sensible ou pas à cette surprenante composition, mais elle confère assurément à cet ouvrage une couleur insolite qui ne laisse pas indifférent.

4 commentaires:

  1. Je ne crois pas avoir lu un roman bulgare jusqu'à présent. Un pays de l'est dont je ne sais pas grand chose, sauf que le passage au monde capitaliste a été aussi brutal qu'ailleurs.

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    1. Je me demande si ce n'était pas, à moi aussi, mon premier roman bulgare.

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  2. Un texte qui happe, en tous cas, en raison de cette écriture singulière, qui a un effet hypnotique. Je l'avais trouvé très fort..

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    1. Oui, tout à fait. C'est une écriture singulière qui a beaucoup d'impact. Ce que j'ai trouvé très intéressant.

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