Marc Fernandez
Paulsen, 2020
Le Cid... vous connaissez. Moi aussi. Naturellement.
Enfin, pas si bien que ça, en fait. Car ce que j’ignorais, c’est que le héros de Corneille avait réellement existé ! C’est même l’une des figures emblématiques de l’histoire et de la littérature espagnoles, dont les exploits sont narrés dans une chanson de geste écrite au début du XIIIe siècle. On pourrait dire que c’est un peu le Roland ibérique.
Marc Fernandez, en revanche, il est possible que vous ne le connaissiez pas... Il faut bien reconnaître qu’il est un tout petit peu moins célèbre que Rodrigue ! Ce spécialiste du polar - qui en publie et lui consacre une revue - en a écrit plusieurs ayant pour cadre les dictatures espagnole et latino-américaines que j’avais vraiment appréciés.
Alors, lorsqu’il se propose de traverser l’Espagne de Burgos, au nord-ouest, à Valence, sur la côte est, pour marcher sur les traces du valeureux chevalier et nous permettre ainsi de découvrir des contrées méconnues de ce beau pays, je le suis !
Enfin, quand je dis «marcher», ce n’est pas tout à fait ça... Si Rodrigue avait accompli ce périple à cheval, Marc Fernandez l’a quant à lui effectué en VTT. Et c’est accompagné d’un guide qu’il a dix jours durant emprunté le fameux GR 160 dit le Camino del Cid.
Au fil des étapes, Marc Fernandez retrace la vie du chevalier, qui combattit vaillamment, se mit au service des taïfa - ces royaumes musulmans sur la péninsule ibérique - qui l’accueillirent bien mieux que le roi de Castille, avant d’imposer un siège cruel à la ville de Valence pour la soumettre.
Mais c’est aussi l’occasion de pénétrer au coeur de l’Espagne profonde, celle que l’on appelle «l’Espagne vide», tant sa densité de population est faible. Plaines désertiques (où furent tournés notamment les westerns spaghetti de Sergio Leone), villages perchés au sommet de cols ô combien éprouvants à gravir, sentiers de montagne à flanc de ravin... Quiconque a traversé ces paysages ne peut qu’avoir été frappé par leur rudesse et leur beauté sauvage parfaitement restituées dans ces pages.
Pénétrer dans ces zones reculées, c’est aussi, Marc Fernandez en fait le douloureux constat, découvrir qu’il existe encore une Espagne nostalgique de Franco, dont le portrait n’a parfois jamais quitté l’unique café du village et auquel les habitués restent fidèles. De quoi trembler de rage, alors que Vox - le parti d’extrême-droite - vient de faire une entrée fracassante au parlement espagnol.
Du moyen âge à nos jours, ce récit sans pédanterie ni temps mort, à hauteur de simple voyageur, entremêle les époques, les souvenirs personnels et les épisodes historiques, pour restituer une figure emblématique de l’Espagne. L'occasion d'esquisser un portrait de ce pays cher à l’auteur qui y puise ses origines. Et un pays qui m’est cher pour les mêmes raisons, même si ces origines sont un peu plus lointaines... Un voyage fort plaisant et un bel exercice de mémoire.
Pourquoi pas, même si les derniers récits de voyage auxquels je me suis frottés m'ont fortement déçu.
RépondreSupprimerL'exercice n'est pas facile, il faut dire... Celui-ci est très vivant et fait découvrir tout à la fois un pays et un personnage. J'ai trouvé ça très plaisant à lire.
Supprimerpourquoi pas? j'ai adoré "Le Cid" au lycée et je ne l'ai pas relu depuis alors d'une pierre 2 coups peut-être
RépondreSupprimerEvidemment Corneille est évoqué, mais juste en passant. C'est vraiment le chevalier lui-même que l'on découvre. Dire que je croyais qu'il s'agissait d'une pure invention de Corneille ! Il faut dire aussi que je ne me suis jamais vraiment intéressée au théâtre classique...
SupprimerJ'avais beaucoup aimé les précédents romans de l'auteur, mais celui-ci ne me tente pas.
RépondreSupprimerCe texte n'a rien à voir avec ses polars. Je peux comprendre qu'on ne soit pas tenté...
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