lundi 22 avril 2024

Les héritiers de l'Arctique

Aslak Nore
Le Bruit du Monde, 2024

Traduit du norvégien par Loup-Maëlle Besançon




Décidément, la famille n’est pas ce havre de paix que l’on pourrait attendre. Surtout lorsque celle-ci est à la tête d’une fortune colossale et d’une fondation de premier plan. Ainsi les Falck sont-ils divisés en deux clans : ceux d’Oslo, qui ont hérité d’un prestigieux patrimoine immobilier et qui dirigent surtout SAGA, un centre d’archives documentant plus particulièrement l’histoire de la Seconde Guerre mondiale en Norvège ; et il y a ceux de Bergen, emmenés par Hans, un médecin renommé qui s’est dès son plus jeune âge engagé dans des ONG pour exercer son métier sur les zones de guerre. 


Dans Le cimetière de la mer, publié l’an dernier, on découvrait l’hostilité farouche que se vouaient les deux branches de la famille, celle de Bergen remettant en cause la légitimité de l’héritage de celle d’Oslo. Evidemment Olav, qui dirigeait SAGA avant de céder son siège à sa fille Alexandra, défendait sa position sans aucun état d’âme. A la fin du roman, ces derniers semblaient avoir gagné la partie.


C’est pourtant sur un coup de théâtre que s’ouvre Les héritiers de l’Arctique. Alors que la famille est traditionnellement réunie pour une trêve de quelques heures à l’occasion du réveillon de Noël, Hans brandit la preuve des exactions commises par Alexandra, qui se trouve dès lors expulsée de son domicile, Hans investissant aussitôt les lieux. Quant à la direction de SAGA, c’est aux actionnaires qu’il reviendra de décider qui en aura désormais la charge…


S’ouvre alors une bataille d’influence visant à gagner les suffrages qui pourraient faire basculer les choses. Les alliances se recomposent au gré des rancoeurs qui resurgissent et des divers intérêts personnels. A mesure que chacun des intéressés manoeuvre, de vieilles histoires remontent à la surface, et les liens régissant les relations entre les différents membres de la famille s’éclairent, mettant au jour des secrets jusqu’alors soigneusement enfouis.


Mais ce qui fait le véritable attrait de ce roman, c’est la manière dont l’auteur entremêle cette féroce saga familiale avec une dimension géopolitique beaucoup plus large. Si les Falck ont des orientations idéologiques différentes, ils frayent tous plus ou moins ouvertement avec des acteurs politiques et économiques majeurs. Chacun joue sa partie, défend ses intérêts dans un contexte international qui n’a cessé de se reconfigurer au fil des décennies, et qui s’est dangereusement tendu avec les visées expansionnistes du voisin russe. Roman d’espionnage autant que saga familiale ayant pour cadre le décor fascinant des fjords norvégiens, ce roman, tout comme le volume précédent, se dévore d’une traite. 


La bonne nouvelle, c’est que les enjeux étant beaucoup trop colossaux pour jeter l’éponge, les dernières paroles prononcées par Alexandra face aux falaises de Rederhaugen laissent présager d’une volonté de revanche. Chez ces gens-là, on ne lâche jamais l’affaire. Du point de vue des conséquences que la préservation et le développement de leurs intérêts engendrent c’est effrayant, mais du point de vue littéraire c’est une véritable aubaine ! Aussi je me réjouis à l’idée de pouvoir, une fois encore, retrouver les Falck.




6 commentaires:

  1. J'avais oublié qu'il devait y avoir une suite au "cimetière de la mer". Je n'avais pas été assez enthousiasmée pour poursuivre. Le seul personnage que j'aurais vraiment envie de retrouver, c'est Johnny Berg.

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    1. je ne sais pas si c'était franchement annoncé... En tout cas pour ma part, je ne m'attendais pas spécialement à une suite mais m'en suis régalée !

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  2. A mon avis on n'est pas près d'en avoir fini avec cette famille ;-) je m'en réjouis aussi. Je te lis en diagonale, j'ai prévu de le lire à un moment ou un autre.

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    1. J'ai dévoré ce deuxième volume avec autant de voracité que le premier. Bonne lecture à toi ;-)

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  3. Je commencerai donc par le premier volet.

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    1. Oui, c'est préférable. D'autant qu'il vient de sortir en poche ;-)

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