Carole Fives
Gallimard, 2022
Qui n’a jamais rêvé de rencontrer un écrivain qui lui est cher ? Imaginé ce qu’il pourrait lui dire ? Eu envie de confronter la réception qu’il a faite d’un texte avec son auteur ?
Elsa Feuillet est une jeune écrivaine au succès que l’on qualifiera de modeste. Son entrée en littérature, peut-être la doit-elle à Béatrice Blandy, auteure de quelque cinq ou six livres qui lui valent l’admiration du public et la reconnaissance de ses pairs. Elsa, qui n’aurait jamais osé l’aborder, espère en son for intérieur une rencontre fortuite au cours d’un salon littéraire. Seulement voilà, Beatrice vient de succomber à un cancer et l’occasion ne se produira jamais. Aussi Elsa décide-t-elle de lui rendre hommage en mettant une citation extraite de son oeuvre en exergue du nouveau roman qu’elle s’apprête à publier.
Deux ans plus tard, le mari de Béatrice, Thomas, touché par cette dédicace, écrit à Elsa et l’invite à déjeuner. A cette première rencontre au domicile même de la grande écrivaine succèderont d’autres entrevues, installant peu à peu entre la jeune femme et le veuf une relation tendre et ambiguë. Elsa finit-elle par prendre la place de Béatrice ? Elle devient la nouvelle compagne de son mari, vit désormais dans ses meubles et va parfois jusqu’à modifier sa façon de se vêtir pour mieux lui ressembler.
De là à se glisser dans son bureau pour y rechercher son dernier manuscrit, il n’y a qu’un pas. Mais qu’en faire une fois celui-ci trouvé ? D’ailleurs, est-il publiable en l’état ? Elsa doit-elle le confier à l’éditrice historique de Béatrice, alors même qu’il ne s’agit que d’une ébauche ? Elsa ne serait-elle pas mieux à même d’effectuer le travail nécéssaire ? Et dès lors qu’elle mêle sa propre voix à celle de Béatrice, doit-elle apparaître en tant qu’auteure ? Que co-auteure ? Quelles sont sa véritable part et sa véritable place ? Mais quelles que soient ses interrogations, Elsa est-elle vraiment maître du jeu qui est en train de se mettre en place ?
Avec ce court roman, Carole Fives interroge le statut d’auteur et explore le lien unissant un écrivain et son lecteur, ainsi que l’impact que les textes écrits par le premier produisent sur le second. Elle scrute également le rôle de l’éditeur, incontournable médiateur de cette relation.
Le propos est évidemment intéressant et plutôt bien abordé. Cependant, peut-être Carole Fives aurait-elle pu le développer un peu plus, insister davantage sur les notions de filiation et de transmission - mais sans doute est-elle plus à l’aise dans les formes courtes. C’est en tout cas ce qu’elle dit d’Elsa Feuillet, dont on soupçonne que Carole Fives lui prête un certain nombre de ses propres attributs.
Mais qui dit « court » peut aussi dire « enlevé », et c’est bien le cas ici. Carole Fives signe en effet un texte vif et sans temps mort. Et elle réussit surtout un joli twist final qui permet de reconsidérer l’histoire sous un angle différent pour lui donner toute son ampleur.
Il y a longtemps que je n'ai pas lu l'auteure, je me laissera bien tenter par ce titre, au vue de ton avis.
RépondreSupprimerD'autant que j'ai vu passer pas mal d'autres avis positifs !
SupprimerJe viens de lire un avis plus mitigé... je n'ai jamais lu cette autrice, tu me donnes envie, j'aime cette thématique !
RépondreSupprimerAh, j'aimerais bien avoir la référence. Je n'ai vu passer que des avis hyper laudatifs - sans aucun bémol.
SupprimerJe viens de lire Térébenthine et j'ai aimé le ton enlevé de l'auteure. Celui-ci me tente bien aussi...
RépondreSupprimerSi tu as aimé Térébenthine, je ne doute pas que celui-ci te séduise également.
SupprimerIl me tente de plus en plus, celui-ci!
RépondreSupprimerArrive un moment où il ne faut plus résister ;-)
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