Davide Coppo
Calmann Levy, 2025
Traduit de l’italien par Samuel Sfez
Les éditeurs ont l’art d’encenser, avec plus ou moins de retenue, les textes qu’ils publient. Je suis plutôt bien placée pour le savoir, mais en tant que lectrice je reste pourtant très influençable ! Aussi n’ai-je pas hésité longtemps avant d’acquérir ce roman relatant l’itinéraire d’un jeune lycéen italien vers le néo-fascisme, présenté comme « audacieux », « d’une actualité brûlante » et « salué par la critique en Italie ».
Au début des années 2000, Ettore est un adolescent comme tant d’autres : introverti et peu sûr de lui. Lorsque, venant de la banlieue, il fait son entrée dans un lycée du centre de Milan, il est déboussolé. Ses résultats scolaires s’effondrent et il se sent isolé : en un mot, il n’a pas les codes. Cela n’empêche pas Alessandro et surtout Giulio, un garçon plutôt charismatique, de s’intéresser à lui. Quand ils l’accueillent au sein de leur cercle amical, Ettore en reçoit comme une bouffée d’oxygène et ne cherche qu’à s’intégrer. Très vite, il est invité à la « Fédération ». Commence alors une initiation à laquelle Ettore va se montrer très réceptif : il n’a pas de conscience politique, et le sentiment d’appartenance à une communauté est le ressort sur lequel va se fonder son cheminement vers le « mauvais côté ».
Dès le prologue, on sait que les choses ont mal tourné pour Ettore. Il a été assigné à résidence pour plusieurs mois par la justice et s’apprête à délivrer son récit. On découvre son environnement familial : des parents d’extraction modeste, une mère qui, grâce à de brillantes études et à force de travail, est parvenue à obtenir un poste à responsabilité, une certaine opacité sur les activités des membres de la famille durant la période fasciste, et, en dépit d’une faible politisation, une condamnation ferme de cette orientation idéologique. En arrière-fond, les violents affrontements entre manifestants altermondialistes et forces de l’ordre dont le G8 de Gênes est le théâtre font la une de l’actualité.
Ainsi un cadre contextuel est-il soigneusement mis en place. Peut-être est-ce ce qui a créé chez moi une attente… qui n’a pas été satisfaite. Le récit reste en effet extrêmement intimiste, ce qui n’est pas dénué de sens, la dimension psychologique étant ici évidemment déterminante. Toutefois, on reste tout au long du récit dans le périmètre très resserré du lycée. Et même lorsque se déroulent des événements qui le dépassent, le manque de mise en perspective m’a un peu gênée. Jusqu’au terme de ma lecture, j’ai attendu en vain que quelque chose décolle, que le roman prenne de la hauteur, que l’angle s’élargisse.
Malgré l’intérêt que ce récit peut présenter, il m’aura finalement laissé un sentiment d’inachevé qui me donne à penser qu’il ne déposera pas en moi une empreinte durable.