mardi 3 novembre 2020

Les graciées

Kiran Millwood Hargrave
Robert Laffont, 2020


Traduit de l’anglais par Sarah Tardy


Prix Rive gauche 2020



Imaginez-vous aux confins de la Norvège, sur une petite île battue par les vents. Le froid est saisissant en ce mois de décembre 1617, mais cela n’empêche pas les hommes de monter à bord de leurs bateaux pour partir à la pêche. Comme de coutume, les villageoises les regardent partir en se réjouissant de se retrouver entre elles. Mais une tempête dont la violence n’a d’égal que la soudaineté précipite les équipages à la mer, qui mettra plusieurs jours avant de charrier les corps vers le rivage.


Tandis que l’effroi saisit les femmes de Vardø, Kirsten tente d’organiser la nouvelle vie qui les attend. Car si ces femmes bénéficient d’abord de la générosité de leurs voisins, il apparaît rapidement qu’elles vont devoir prendre leur destinée en main. Kirsten propose d’aller elle-même pêcher le poisson nécessaire à leur subsistance. Pour cela, il lui faut une vingtaine de femmes à ses côtés. Mais une telle décision n’est pas du goût de tous. Et surtout pas du nouveau seigneur des lieux, ni du délégué Absalom Cornet venu tout droit d’Ecosse où il s’est illustré dans un procès pour sorcellerie qui condamna des malheureuses à être brûlées vives.

 

Si les lapons, sommés de renoncer à leurs rites ancestraux, sont les premières cibles des deux hommes, les femmes les moins soumises à l’autorité et aux préceptes de l'Eglise sont également en ligne de mire : porter un pantalon, posséder des figurines chamaniques, ne pas se rendre à l’office religieux, refuser de se plier aux règles énoncées par les bigotes du village constituent autant de signes propres à vous envoyer sur le bûcher…


L’auteure s’est inspirée de faits réels pour retracer l’histoire de ces femmes qui furent accusées de sorcellerie parce qu’elles avaient cru pouvoir échapper aux règles patriarcales et vivre en toute autonomie. A travers une galerie de personnages féminins parfaitement campés - depuis l’intransigeante Kirsten à la délicate épouse du délégué tentant progressivement de se dégager de l’emprise d’un mari odieux, ou à l’implacable Diinna rejetée par sa communauté -, elle noue les fils d’une fiction envoûtante et démonte parfaitement les mécanismes d’une société oppressive conjuguant les pouvoirs séculaire et religieux pour écraser toute tentative d'émancipation. Un récit absolument glaçant. 



C'est Kathel qui m'a donné envie de lire ce livre... que j'ai lu en même temps que Papillon.

12 commentaires:

  1. Tu sembles plutôt conquise... je l'ai trouvé très bien fait, je me suis complètement immergée dedans !

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    1. Moi aussi - même si j'ai eu un tout petit peu de mal au départ (je crois que j'avais un peu la tête ailleurs et je n'avais pas compris au départ qu'Ursa n'était pas native de Vardo. Un petit défaut d'attention consécutif au reconfinement, sans doute...) :-))

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  2. Ah oui, synchro avec Papillon... Fait partie de ceux que je lirai probablement dans un second temps, en poche.

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    1. Mais oui, un second temps, ça ira très bien aussi. Je pense vraiment que ce roman pourrait te plaire :-)

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  3. Comme Kathel, je me suis complètement immergée dedans, mais sur le plan historique il ne m'a rien appris que je ne sache déjà...

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    1. Quant à moi, je ne suis vraiment spécialiste de l'histoire scandinave... Et je trouve que l'atmosphère des lieux et de l'époque est extrêmement bien restituée.

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  4. Je l'ai beaucoup aimé ce roman ! Et oui glaçant à tout point de vue.

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    1. L'ambiance de l'hiver scandinave et la rigueur religieuse sont hyper bien restituées !

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  5. je l'ai noté, il n'y a plus qu'à...

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  6. Noté chez Kathel. Tu confirmes mon envie de le lire.

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