Laurent Petitmangin
La Manufacture de livres, 2020
Ai-je aimé ce livre ? A l’heure de rédiger ma chronique et alors que j’en ai terminé la lecture depuis plusieurs jours, je me pose encore la question.
Incontestablement, il m’a serré le coeur. Mais quel parent ne serait pas saisi aux tripes par l’histoire de cet enfant ayant perdu sa mère au terme d’une longue maladie et qui, devenu adolescent puis jeune adulte, se fourvoie dans de mauvaises fréquentations qui le conduiront vers l’irréparable ? Qui ne serait ému par ce père voyant son fils tourner le dos aux valeurs qu’il pensait lui avoir transmises et se couper irrémédiablement de lui ? Quelle personne viscéralement opposée à l’extrême-droite ne serait pas assaillie par un sentiment de révolte à l’idée qu’un petit gars un peu paumé puisse être récupéré par une bande de jeunes fachos ?
Ce bref roman appuie là où ça fait mal. Il faut reconnaître qu’il le fait avec un certain talent, par une écriture sèche, efficace, qui vous attrape par le col. Oui, j’ai parfois reçu un coup de poing dans le plexus en en tournant les pages.
Mais je suis aussi restée sur ma faim. J’aurais aimé que la relation étroite qui unit le jeune héros à son petit frère soit plus approfondie ; j’aurais voulu que la psychologie du père soit plus fouillée pour comprendre ce qui le décide finalement à soutenir son fils après s’en être détourné; et puis surtout j’aurais vraiment voulu que l’auteur entre dans la tête du jeune garçon pour nous livrer tous ses tourments : que ressent-il à l’égard de son père ? De son frère ? Quelles séquelles la mort de sa mère et les longues heures passées à son chevet ont-elles laissées sur lui ? Rejoint-il les partisans de Marine Le Pen en réaction contre son père ou par simple désoeuvrement ? Quelle part de provocation dans ce geste ? J’attendais vraiment de connaître sa part de vérité, et elle ne nous est jamais livrée. Si bien que la fin m’a déconcertée, me donnant la nette impression que l’auteur ne savait pas comment effectuer sa sortie et me laissant de ce fait sur un petit goût d’inachevé…
J'ai aimé ce roman, l'aspect sobre de l'écriture et les ellipses ne m'ont pas gênée... (billet à venir, comme tant d'autres, pfff)
RépondreSupprimerL'écriture sobre, non. J'ai trouvé que l'auteur trouvait une bonne manière d'évoquer ce sujet de la filiation et de la relation père-fils. Mais j'ai eu l'impression qu'on jouait sur ma corde sensible sans trop m'expliquer les choses. C'est ça qui m'a gênée. Et la fin. Tu ne l'as pas trouvée expédiée ?
SupprimerJe lirai ton billet, bien sûr !
Je n'étais pas hyper tentée, de toute façon....
RépondreSupprimerBon, sans regret, donc ;-)
SupprimerJe ne l'ai pas encore lu, on en parle effectivement beaucoup et j'ai l'impression, vu sa brièveté, d'avoir déjà l'essentiel en tête. Je pense comprendre ton ressenti...
RépondreSupprimerDu coup, vas-tu le lire ? Si j'ai bien compris, les 68 vont reprendre en janvier, avec une session annuelle qui couvrirait les deux rentrées. C'est bien ça ?
SupprimerOui, la base de la prochaine session sera la rentrée d'hiver 2021 mais on embarquera aussi les coups de coeur de l'année 2020, s'il y en a.
SupprimerAh oui ton ressenti est très différent de celui de Kathel, c'est intéressant.
RépondreSupprimerOui, les ellipses, les non-dits et la fin, contrairement à moi, ne l'ont pas gênée !
SupprimerJ'ai lu le billet de Kathel ce matin et je suis tentée, malgré ton peu d'enthousiasme. Je vais voir d'abord si la bibli a prévu de le commander.
RépondreSupprimerSe faire sa propre idée, c'est encore ce qui de mieux à faire ;-) Je guetterai ton avis.
Supprimerj'ai vu qu'on en parlait beaucoup mais je n'ai pas trop envie, du moins pour le moment :-)
RépondreSupprimerCe n'est pas moi qui insisterais ;-)
SupprimerUn roman qui aurait pu être un coup de coeur.
RépondreSupprimerCarrément ? Je note toutefois le conditionnel...
SupprimerVoilà, je viens de le lire et je te rejoins complètement. Je suis restée sur ma faim moi aussi, notamment dans le dernier tiers. Autant en amont j'aimais bien le fais que l'auteur reste focus sur le père et ses sensations, ses empêchements... autant j'aurais aimé une exploration plus large dans le money time histoire de mieux cerner la psychologie du fils et ses motivations avant l'acte ultime. Il manque clairement quelque chose.
RépondreSupprimerJe vais aller te lire, du coup !
SupprimerAh je ne sais pas encore si je ferai un billet... en ce moment j'enquille les lectures pour la sélection ;-)
SupprimerJ'ai beaucoup aimé, amis je comprends ce qui a pu te gêner. Pour ma part, j'ai été en apnée du début à la fin. Ce livre a sans doute des défauts mais j'étais tellement dedans que j'ai tout pris en pleine figure. C'est rare les livres qui me font cet effet.
RépondreSupprimerApparemment, tu n'es pas la seule à qui il a fait cet effet... :-)
SupprimerIl est vrai que la psychologie des personnages n'est pas explorée. Mais c'est ainsi que ça se passe ici (je vis dans ce coin perdu de Lorraine) on est taiseux, tout est dans le non-dit,on évoque, on n'explique pas. Chacun se débrouille avec son histoire. Chacun fait ses choix. Je pense que c'est ce qu'a voulu laisser transparaître l'auteur. C'est plus une atmosphère qu'il décrit. Enfin, c'est ainsi que je l'ai lu et compris.
RépondreSupprimerMerci pour cet éclairage, qui me permet en effet de percevoir quel a pu être le projet de l'auteur.
SupprimerCependant, la littérature peut aussi être le lieu où l'on peut aller plus loin, où l'on peut justement essayer de mettre au jour ce qui reste dans l'ombre dans la réalité... En tout cas, j'ai pour ma part regretté qu'il ne nous soit pas donné plus de clés pour comprendre ces personnages.
Oui, je l'ai aussi regretté et puis je le suis dit que chacun pouvait imaginer l'histoire.
RépondreSupprimerCe livre m'a vraiment beaucoup touchée quoiqu'il en soit.
Merci pour vos chroniques🙏