dimanche 15 novembre 2015

Intérieur nuit


Marisha Pessl

Gallimard, 2015

Traduit de l'américain par Clément Baude

☀ ☀

Passé l'effroi, la sidération, le choc, je publie mon billet comme prévu, pour ne pas laisser croire aux barbares qu'ils pourraient avoir gagné un pouce de terrain.

Voilà un roman que je brûlais d’envie de lire ! La quatrième de couverture m’avait franchement mise en appétit et les billets plus qu’enthousiastes de certaines d’entre vous avaient achevé de me convaincre. Vu le morceau, je me l’étais gardé pour une période de congés... et j’ai rudement bien fait, car ces quelque 700 pages et des poussières se lisent avec avidité.

Etrangement, il présente une certaine proximité avec ce qui avait été ma précédente lecture, Archives du vent (j’ai un peu bousculé l’ordre de mes billets) : on est dans le milieu du cinéma et l’intrigue tourne autour d’un réalisateur de génie auréolé de mystère, vivant en retrait du monde et proposant une œuvre hors norme. Moyennant quoi, il règne autour d’eux une atmosphère étrange et inquiétante, qui semble naître de leurs films eux-mêmes, mais peut-être aussi de leur personnalité...

Soyons clair, j’ai nettement préféré le roman de Pessl à celui de Cendors, même si l’écriture du second offre une qualité littéraire nettement supérieure à la première, dont le style reste assez classique, mais néanmoins efficace, grâce notamment aux nombreux dialogues, fidèle en cela à une certaine tradition américaine.
L’incorporation de copies de pages écran de sites internet, de photos ou de fac-simile d’articles de journaux témoignant des recherches du héros est une trouvaille amusante. Ces documents sont cependant censés mettre le lecteur sur une sorte de pied d’égalité avec le narrateur et l’entraîner dans les mêmes chausse-trappes que lui. On est supposé s’interroger sur ce que l’on découvre et la manière dont les indices sont interprétés. J’ai envie de dire : rien de nouveau sous le soleil. A la lecture des différents billets, je m’attendais - peut-être à tort - à une sorte de mise en abyme, à une fiction s’interrogeant sur elle-même, où l’on ne saurait plus démêler le réel du fictif. Or il n’en est rien, d’où une légère déception. A aucun moment, je ne me suis sentie prise en défaut pas l’auteur ou prise à partie dans mon statut de lectrice. On sait constamment où l’on se trouve et je ne me suis jamais demandé où voulait m’emmener l’auteur.
Ces réserves faites, il reste que l’intrigue est habilement menée, l’atmosphère est parfois glaçante - en dépit de quelques petites maladresses visant à accentuer le caractère terrifiant des événements qu’on pardonne aisément à ce jeune auteur - et on lit les 200 dernières pages avec une véritable frénésie. 

Une lecture plaisir, donc, parfaite si l’on recherche le frisson sans voir le sang couler à toutes les pages !


Les avis franchement enthousiastes de Papillon, Eve et Laure ; celui de Brize, que je partage en tout point.  




22 commentaires:

  1. un gros pavé! Mais pourquoi pas!

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  2. je comprends ton envie de ne rien changer à tes projets, j'étais pour ma part tellement sidérée au sens fort du terme que du coup j'étais incapable de mettre quelque chose en ligne mais ce sera pour demain car la vie continue

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    1. En fait, mon billet était déjà prêt depuis quelque temps. Le rédiger aurait sans doute été plus difficile...

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  3. J'ai lu des avis plus mitigés mais je reste curieuse. Ayant enchainé plusieurs polars ces derniers temps, je vais faire une petite pause mais il est noté...peut-être pour sa sortie en poche...

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    1. Oui, rien ne presse.
      Quant à moi, j'avais lu des avis plutôt ultra enthousiastes... Tu te feras ton propre avis !
      Merci en tout cas pour ta visite.

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  4. J'ai failli l'emprunter vendredi à la biblio, mais avec mes lectures pour le prix Elle et vu le pavé, je préfère attendre.

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  5. Je le prendrai sans doute à la bibliothèque, mais sans urgence. Il ne fait pas partie de ceux qui me tentent absolument.

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  6. Vous avez eu raison de publier votre billet - c'est mon avis : nous devons rester debout.
    Bravo.

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    1. Merci. Continuons à vivre et surtout à réfléchir, penser - ce que ces barbares n'aiment pas - pour trouver la meilleure façon de les combattre.

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  7. sidération, compassion, empathie, solidarité, union, nationale ou pas...combattre la peur, sa peur , son angoisse, c'est peut-être par la mise à distance, par les gestes de la routine que nous serons en mesure de résister, sans oublier. La lecture, si elle est aussi échange, partage et débat pacifique et pas seulement acte intime contribue a cette résistance en mettant à distance notre peur intime....continuer la tenue de ce blog c'est ce que je souhaite



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    1. Merci pour ces mots. J'avoue qu'il est difficile encore de savoir quoi faire. Mais la vie doit poursuivre son cours, affirmée avec d'autant plus de force.

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  8. Suite à ton billet, je suis restée attentive à ce nom et j'ai croisé son précédent roman à la bibliothèque : un sacré pavé aussi! L'as-tu lu?

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    1. Non, mais je sais que d'autres qui l'ont lu l'ont apprécié...

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  9. Il est noté depuis un moment (malgré les réserves à droite et à gauche)...Effectivement, en lisant les billets, je l'attendais un peu à la même chose que toi.

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    1. Ah ben ça me rassure, parce que j'ai cru que je m'étais monté le bourrichon toute seule !

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  10. J'ai lu des avis bien plus négatifs. Mais j'aime qu'il n'y ait pas de consensus sur un texte, c'est souvent gage de qualité au final ;)

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    1. Absolument ! Et mon avis n'est pas négatif, il est juste nuancé ;-)

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