Entretiens

mardi 31 décembre 2019

Je lis donc je suis 2019


Et voici revenu le temps de ce tag délicieux
retraçant une année de lectrice...

Photo : Félix à Paris


Décris-toi…

Comment te sens-tu ?

Décris où tu vis actuellement…

Si tu pouvais aller où tu veux, où irais-tu ? 

Ton moyen de transport préféré ?

Ton/ta meilleur(e) ami(e) est…

Toi et tes amis vous êtes…

Comment est le temps ?

Quel est ton moment préféré de la journée ?

Qu’est la vie pour toi ?

Ta peur ?

Quel est le conseil que tu as à donner ?

La pensée du jour…

Comment aimerais-tu mourir ?

Les conditions actuelles de ton âme ?

Ton rêve ?



Et vous, avez-vous défini votre portrait de lecteur ou de lectrice ?

lundi 30 décembre 2019

Cette petite crapule de Maupassant


Arne Ulbricht

Editions du Sonneur, 2019


Traduit de l’allemand par Elisabeth Willenz



Compte tenu de ma nette inclination pour les romans mettant en scène écrivains et artistes du XIXe siècle, il n’est pas étonnant que j’aie reçu celui-ci pour Noël. Et je dois dire que ce cadeau m’a d’autant plus surprise et enchantée que cela fait bien longtemps que  mon entourage ne se risque plus à m’offrir de livres... 

Tout l’intérêt de ce type de récit est de permettre de mieux connaître un artiste en allant souvent au-delà de la simple narration d’éléments biographiques. Il s’agit d’essayer de saisir un tournant, de restituer la complexité d’une psychologie, ou encore de replacer le parcours d’un homme ou d'une femme dans un contexte historique, tout cela pour mieux comprendre sinon son oeuvre, au moins les conditions de sa création.
Ainsi Jean-Paul Delfino en relatant les dernières heures de Zola a-t-il réussi grâce à un dispositif narratif original à mettre en perspective les combats politique et littéraire de l’écrivain et la manière dont ceux-ci furent reçus, ainsi que l’acharnement dont il fut l’objet. Matthieu Mégevand a quant à lui parfaitement rendu par la brièveté et l’intensité de son récit les paradoxes, les forces et les faiblesses de Toulouse-Lautrec, et la manière dont celui-ci les a dépassés pour exercer son art. Paul Vacca mêlait dans Au jour le jour les éléments de biographie d’Eugène Sue avec l’histoire et les personnages des Mystères de Paris pour retracer le cheminement qui l’avait conduit à l’écriture et à l’engagement politique qui en a résulté. Les exemples ne manquent pas pour nous montrer que la réussite résulte souvent de choix narratifs singuliers et assumés.

Arne Ulbricht s’est quant à lui intéressé aux années d’entrée en écriture de Maupassant : la relation particulière qu’il entretenait avec Flaubert, sa rencontre avec Zola et le groupe de Médan, son insatiable amour des femmes et sa non moins insatiable vigueur sexuelle, sa frustration à n’être pas publié à ses débuts... Mais on n’apprend que très peu de choses que l’on ne sache déjà - pour peu que l’on s’intéresse un tout petit peu à cette époque. 
Si le livre n’est pas désagréable à lire, il n’en reste pas moins d’une désolante platitude, l’auteur enchaînant les jours et les années avec la rigueur d’un élève appliqué. Soucieux de bien souligner la genèse de l’oeuvre, il émaille son récit d’indices et de scènes qui donneront lieu à des nouvelles (mais ne craignez pas de ne pas les (re)connaître, l’auteur est très explicite !). 

Je ne doute pas qu’Arne Ulbricht se soit fort documenté pour écrire son livre (qu’il présente comme une déclaration d’amour à la littérature française) mais je dirais qu’une bonne biographie académique aurait tout aussi bien (mieux ?) fait l’affaire... Dommage.

(PS : Je tiens à préciser que cela n'ôte rien au plaisir que j'ai eu à recevoir un tel cadeau... ;-)





dimanche 22 décembre 2019

La meute


Thomas Bronnec

Les Arènes, 2019



La déliquescence de la gauche, l’affrontement de deux candidats pour le mandat suprême sur fond d’accusations plus ou moins fondées relayées par les réseaux sociaux et la presse... ça vous parle ? C’est peu de dire que le nouveau roman de Thomas Bronnec est solidement ancré dans notre actualité et notre quotidien ! 

Si l’un des deux prétendants à la présidence de la république, François Gabory, est un vieux de la vieille qui croit pouvoir capitaliser sur son nom et son expérience, l’autre, Claire Bontems, est une femme incarnant la jeune génération, celle qui maîtrise parfaitement les nouveaux codes de la com’ et a compris que la campagne se jouait désormais avec ces seuls outils. Elle s’y entend comme personne pour lancer des bombes qui vont lui permettre d’occuper la scène médiatique et de disqualifier son concurrent. D’autant que #metoo est passé par là et que le terrain a été soigneusement préparé pour affaiblir la position de Gabory... 
Mais Claire Bontems n’est-elle pas elle-même le jouet d’autres intérêts et d’autres objectifs qui risquent de la perdre ? Les bas-fonds de la Toile sont si nauséabonds que l’on peut toujours trouver plus retors et malveillant que soi...

Les fake news, le poids et le rôle des réseaux sociaux, la boue que ceux-ci n’en finissent pas de charrier, le traitement de l’info par les journalistes, la domination masculine, la reproduction des élites... ces sujets constituent autant de fils nouant l’intrigue de cette fiction aux accents noirs faisant bien trop écho à ce que nous apprenons jour après jour dans la presse pour que nous puissions la lire sans frémir...  Mais c’est aussi ce qui lui donne tout son prix !


Nicole a beaucoup aimé aussi


mardi 10 décembre 2019

Torrentius

Colin Thibert

Héloïse d’Ormesson, 2019


Connaissez-vous Torrentius ? Sans doute pas...
Je n’en avais moi-même jamais entendu parler avant d’ouvrir ce bref roman. Et pour cause ! De toutes ses oeuvres, une seule demeure visible aujourd’hui, leur destruction ayant été ordonnée par la justice hollandaise du XVIIe siècle. Le talent de ce peintre était pourtant largement reconnue, excédant les frontières de son pays, jusqu’à susciter l’admiration du souverain Charles Ier d’Angleterre.

Mais il faut dire que le bonhomme avait un goût prononcé pour les gravures licencieuses qu’il réalisait, semble-t-il, avec une habileté et un réalisme saisissants. Un goût bien peu compatible avec le rigorisme des autorités... D’autant que Torrentius - de son vrai nom Johannes van der Beeck - ne donnait ni dans la discrétion ni dans la modération. Il ne cherchait guère en effet à cacher son amour de la bonne chère et des femmes...

Colin Thibert exhume cette figure tombée dans l’oubli, brossant avec talent et une très discrète pointe d’ironie le portrait d’un homme trop singulier, trop libre et trop frondeur pour son époque. Un personnage hautement romanesque, dont on regrette vivement, à lire ce roman, de ne plus pouvoir admirer les oeuvres... 

samedi 7 décembre 2019

Sélection Noël 2019


Comme tout un chacun, vous devez être en train de commencer à faire vos cadeaux de Noël... ou au moins à y songer ! Si vous voulez offrir des livres - ce qui me semble être une excellente idée - voici quelques suggestions : l’occasion de remettre en avant quelques-uns des plus beaux textes que j’ai lus depuis la rentrée... 
Peut-être vous laisserez-vous tenter ?





Olivier Adam, Une partie de badminton, Flammarion
C’est vrai, tout le monde n’aime pas cet écrivain. Nombriliste, geignard, il est souvent accusé de nombreux maux... bien à tort !
Pour qui le suit comme moi depuis longtemps, il offre sur le monde un regard c’est vrai désabusé, mais aussi dans ce roman, plein d’autodérision et d’humour. Le retrouver de livre en livre est pour moi toujours une joie. Et cette Partie de badminton est un excellent cru !

Jonathan Coe, Le Coeur de l’Angleterre, Gallimard
Encore un écrivain que je retrouve toujours avec un plaisir très vif. Et avec cette suite aux mythiques Bienvenue au club et Un cercle fermé, le bonheur était décuplé ! Après avoir brossé la tableau de l’Angleterre de Thatcher et de Blair, Jonathan Coe nous plonge dans les affres du Brexit avec le souffle romanesque et la touche d’humour so british qu’on lui connaît. 

Jean-Paul Delfino, Assassins !, Héloïse d’Ormesson
Zola asphixié par accident ? Jean-Paul Delfino n’y croit pas une seconde. Mêlant souvenirs de l’écrivain et restitution du climat de l’époque, Delfino imagine les dernières heures du grand Emile...  

Jérôme Garcin, Le dernier hiver du Cid, Gallimard
Nul besoin d’être particulièrement fan de Gérard Philipe pour apprécier ce roman d’une immense délicatesse. Car, en retraçant là encore les derniers jours du comédien, Garcin fait le portrait d’un homme sensible et généreux, habité par la rage de vivre, contraint d’affronter la maladie. Ce récit m’a émue plus que je ne saurais le dire.

Violaine Huisman, Rose désert, Gallimard
Si vous aimez vous laisser emporter par une écriture puissante et pleine d’expressivité, ne passez pas à côté de Violaine Huisman ! Certes il faut être sensible aux récits personnels, entièrement habités par la personnalité de leur auteur, mais si c’est votre cas - ou celui de la personne à qui vous souhaitez l’offrir, l’émotion et l’exaltation seront au rendez-vous !

Matthieu Mégevand, Lautrec, Flammarion
En quelques pages magnifiques, ce bref roman nous brosse mieux que n’importe quelle biographie de spécialiste le portrait de ce peintre exceptionnel. Mégevand nous plonge dans le Paris nocturne et interlope de la fin du XIXe siècle pour évoquer cet homme sensible et singulier.

Olivier Rolin, Extérieur monde, Gallimard
Pour l’écriture poétique et envoûtante de celui qui reste pour moi le plus grand. 
Un récit extrêmement personnel où se mêlent souvenirs de voyages, réflexions sur la vie, portraits de femmes aimées ou d’amis disparus...



Sans oublier que de très bons livres sont sortis aussi 

Très heureuses fêtes à tous !