Olivier Adam
Flammarion, 2022
Mettons tout de suite les choses au point : oui, Olivier Adam, écrit toujours dans la même veine. Oui, il parle encore de lui, de ses questionnements face à l’existence et de ses difficultés à être au monde. Et, oui, ceux qui le trouvent insupportablement nombriliste hurleront encore à l’imposture littéraire (sans souvent même avoir lu son livre).
Ceci posé, les autres retrouveront dans ce nouveau texte toutes les nuances de l’âme d’un individu cherchant sa place, refusant obstinément de se soumettre aux conventions et d’accepter les faux-semblants. Les livres d’Olivier Adam se suivent… et ne se ressemblent pas. Certains me subjuguent quand d’autres me laissent de marbre. A quoi cela tient-il ? A la distance et à l’ironie qu’il distille avec plus ou moins de prodigalité ? A l’intégration d’éléments narratifs exogènes (je n’avais pas du tout été convaincue par le précédent, dans lequel il était question du Japon) ? Quoi qu’il en soit, il en est des récits d’Adam comme des films de Klapisch : je vieillis avec, évoluant au même rythme qu’eux, et c’est sans doute ce qui me touche.
C’est un roman à trois voix qu’Adam nous propose aujourd’hui. Celle de Paul - nouvel avatar de l’auteur -, de son jeune frère Antoine et de son aînée Claire. Une fratrie dont on comprend rapidement qu’elle a volé en éclats. Paul est un réalisateur, tendance Pialat : exigeant et réfractaire à toute forme de concession. Ses films sont d’inlassables retours sur sa propre vie qu’il réinvestit en y projetant ses doutes, ses colères, ses amertumes, ses aspirations aussi. Autant de blessures qu’il n’a cessé d’infliger à sa famille. Si Claire conserve malgré tout une certaine tendresse à son égard, Antoine lui voue une rancoeur tenace.
Ils vont pourtant se retrouver dans l’enceinte du foyer familial, aux côtés de leur mère, à la veille de l’enterrement de leur père. Ce père avec lequel Paul avait rompu toute forme de dialogue depuis bien longtemps. Il ne manquera pourtant pas cet ultime rendez-vous, qui sera bien sûr un instant suspendu, où la parole se libérera, où les regards changeront de perspective et qui sera l’occasion de réexaminer l’histoire familiale.
Construit comme une pièce de théâtre - dont la mise en abîme constitue un ultime pied de nez de l’auteur - ce texte est empreint d’une sensibilité exacerbée, d’inattendus accents de nostalgie et d’une forme d’inquiet apaisement dans la maturité s’installant. Chacun - du moins parmi ceux qui y consentent - pourra se retrouver dans certains traits, dans certaines réflexions ou dans certains sentiments des personnages placés dans une situation que nous sommes tous amenés à vivre un jour ou l’autre. Et c'est bien là, me semble-t-il, dans cet effet miroir, que réside l'attachement des fidèles lecteurs d'Olivier Adam.