Christian Astolfi
Le Bruit du monde, 2022
Prix France Bleu-Page des libraires 2022
A La Seyne-sur-Mer comme ailleurs en France, les chantiers navals ont longtemps fait la fierté de ceux qui y travaillaient : la mise à l’eau d’un nouveau navire était l’occasion d’une cérémonie à laquelle les ouvriers qui l'avaient bâti se réjouissaient de prendre part, revêtus de leur habit du dimanche. D’ailleurs, le Chantier, on n’y travaillait pas, on en était, « comme on est d’un pays, d’une région, avec sa frontière. » Mais vous connaissez l’histoire : désindustrialisation, choc pétrolier, concurrence internationale… plans de restructuration, licenciements, le Chantier se délite peu à peu.
Un espoir immense, cependant, surgit, celui de l’accession de la gauche au pouvoir. Avec Mitterrand et des ministres communistes au gouvernement, les lendemains vont enfin chanter et la navale vivra ! Enfin… certains ne peuvent s’empêcher de douter, et le tournant de la rigueur leur donnera rapidement raison. A la fin des années 80, le Chantier ferme définitivement ses portes.
L’histoire n’est pas finie pour autant. Les ouvriers sont touchés par une maladie qui atteint leurs poumons et leurs capacités respiratoires. Comme un deuxième round fatidique, l’amiante à laquelle ils ont été exposés lorsqu’ils exerçaient leur métier les tue à petit feu. Et même si, par bonheur ou par miracle, ils en réchappent, l’épée de Damoclès est là, qui empoissonne les jours qui leur restent.
Et pourtant, on savait. Il en faudra de la pugnacité pour faire éclater le scandale, longtemps contenu par les lobbys...
Avec les mots simples des protagonistes et une extrême pudeur, sans effet de manche ni de pathos, Christian Astolfi retrace le chemin de ces ouvriers que l’on a voulu reléguer aux oubliettes de l’histoire pour leur rendre toute leur dignité. Plus largement, il restitue une époque, ses espoirs et ses combats. Il nous invite ainsi à réfléchir à ce qu’il reste d’un monde lorsqu’on s’acharne à le vider de toute forme de transmission, de solidarité, de collectif, et qu'il n'y a plus que la seule et vertigineuse recherche de rentabilité pour faire loi. Des questions plus que jamais à l’ordre du jour.
En plein dans l'actualité en effet ; il y a tant d'histoires du monde ouvrier que l'on a passées sous silence. C'est intéressant que les romanciers s'y intéressent aujourd'hui.
RépondreSupprimerOui, je suis d'accord avec toi, c'est une excellente chose, en effet.
SupprimerIntéressant, ensuite cela dépend du style...
RépondreSupprimerLe style est sobre. L'auteur suggère parfois plus qu'il n'affirme. Il me semble en parfaite adéquation avec le sujet, il est à hauteur des personnages que le récit met en scène. Il y a beaucoup de pudeur et de délicatesse. C'est très réussi.
SupprimerCe titre me tente et le catalogue débutant de cette jeune maison d'édition est prometteur.
RépondreSupprimerTout à fait d'accord !
SupprimerOn est dans l'un de tes thèmes de prédilection me semble-t-il :-)
RépondreSupprimerQue tu me connais bien ! Je ne pouvais en effet pas passer à côté de ce livre...
Supprimeraucun bémol à relever alors? ça me tente bien !
RépondreSupprimerEh bien... non. Après, il faut être sensible à ce type de littérature, à caractère social, qui ne cherche pas l'effet.
SupprimerUn livre important. J'habite La Seyne sur Mer donc je connais bien l'histoire des chantiers qui concerne de nombreux Seynois. Je suis contente que vous ayez parlé de ce livre. Bonne journée.
RépondreSupprimerJ'imagine, oui, que ce livre vous a particulièrement touchée. Mais au-delà de l'histoire de ces chantiers c'est celle de la classe ouvrière qui nous est donnée à voir. C'est donc une histoire qui résonne bien au-delà de cette ville...
SupprimerOui, vous avez tout à fait raison. C'est pourquoi j'espère que ce livre aura un retentissement bien plus large que la ville, le département ou la région.
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