Tonino Benacquista
Gallimard 2020
Je ne rate jamais un roman de Benacquista, et j’ai coutume de dire qu’il fait partie de cette famille rare et précieuse d’écrivains capables de vous emporter en vous racontant n’importe quelle histoire. Même la plus improbable. Même la plus banale. Et peut-être est-ce plus vrai encore aujourd’hui avec ce nouveau livre.
Car j’ai avalé ce roman d’une traite, goûtant les mille inventions qui jaillissaient de ses pages, me disant parfois intérieurement : «Mais quelle formidable idée !», impressionnée que j’étais par cet imaginaire totalement débridé, offrant à mon admiration autant de germes de fictions incroyables que j’aurais eu envie de découvrir.
Il faut dire que la fiction, comme elle le fut naguère dans Saga, est au coeur de ce roman, dont le héros s’enferme pendant plusieurs semaines pour littéralement se gaver de séries. Françaises, brésiliennes, anglo-saxonnes, contemporaines, historiques... tout y passe, et les personnages qui les peuplent deviennent peu à peu les seuls et uniques compagnons de Léo. La réalité et la fiction se mêlent alors, et il finit par ne plus percevoir le monde qu’à l’aune de ces chimères.
Hélas, le lecteur lui-même finit par s’y perdre et ne plus très bien savoir où il en est ni où l’écrivain veut en venir. Pour la première fois peut-être, Benacquista semble avoir échoué à donner une vraie cohérence à son récit, dont on ressort déconcerté. Un peu comme au sortir d’une trépidante série dont on aurait eu plaisir à suivre les multiples rebondissements, mais dont les dernières images nous laisseraient sur un vague sentiment d’inachevé, avec cette interrogation: «Tout ça pour ça ?»