Entretiens

mardi 21 avril 2015

Je me suis tue

Mathieu Menegaux

Grasset, 2015




Un récit qui embarque le lecteur pour ne plus lui laisser le temps de souffler. 

Quel est ce crime odieux mentionné en quatrième de couverture? Que s’entête à cacher cette femme derrière son mutisme, alors que ses actes l’ont conduite en prison? Que s’est-il passé pour que cette DRH équilibrée, au train de vie confortable, en arrive à commettre l’irréparable et, surtout, à vouloir à tout prix taire ce qui s’est passé, qui pourrait pourtant permettre d’expliquer, sinon justifier son geste ?

Dès les premières pages, avec ce qui est suggéré d’une douleur profonde et lorsque surgit le facteur déclenchant des événements, on devine tout ce qui va arriver et on obtient assez rapidement les réponses posées à ces questions.
Cela n’enlève en rien l’intérêt de ce livre. D’autant que si l’on anticipe à peu près l’enchaînement des faits, l’ultime retournement m’a quant à lui complètement cueillie et je n’ai pu m’empêcher alors de refaire le film dans l’autre sens, comme l’héroïne le fait elle-même à plusieurs reprises : si seulement Claire avait agit autrement...

Ce livre, par sa brièveté, est d’une densité qui en rend la lecture parfois oppressante. On éprouve de l’empathie avec le personnage; on reconnaît sa douleur originelle, on comprend les différents choix qu’elle fait dans l’urgence, bien que l’on sache qu’ils ne sont pas les bons. Chaque pas qu’elle fait la conduit inexorablement vers la tragédie. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Claire se débat entre l’abjection qu’elle voudrait effacer de sa vie et la satisfaction d’un désir irrépressible qui lui donnerait enfin un sens.

Mathieu Menegaux, pour son premier roman, se glisse dans la psyché d’une femme. Ce n’est guère aisé, mais il le fait pourtant avec un certain talent. Son écriture est efficace, dense; peut-être glisse-t-il dans son texte un peu trop d’indices sur ce qui va se passer, mais cela ne gâche pas la lecture.
Une seule chose m’a un peu dérangée dans le texte, ce sont les différents titres ou extraits de chanson dont l’auteur émaille son récit. Il m’a semblé que cela n’apportait rien et que cela conférait au contraire au texte des accents de légèreté tout à fait décalés. J’avoue n’avoir pas saisi la raison de ce choix...
Cela ne retire rien à la qualité de ce roman, qui mérite qu’on s’y arrête.


C'est Clara qui m'a donné envie de le lire !


10 commentaires:

  1. Clara m'avait déjà tentée, tu enfonces le clou !

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    1. C'est vrai qu'elle avait fait fort sur ce coup-là !
      En plus, ça se lit très vite !

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  2. L'histoire a l'air corsée, j'espère le trouver à la bibliothèque.

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    1. Plutôt sombre, oui. Ceci dit, j'attends de voir ce que je vais en retirer sur le long terme, passé le coup de poing de la lecture.

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  3. Je l'avais noté, et je vois bien ce que tu veux dire quand tu parles de lecture oppressante. Je tenterai quand même s'il est court. Un peu dans le même registre (mais autre contexte), je te conseille "Tu ne jugeras point" d'Armel Job.

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    1. Merci ! Je n'en ai jamais entendu parler... Je vais aller voir si tu l'as chroniqué sur ton blog.

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    2. Non je l'avais lu avant le blog. En revanche, j'avais chroniqué un autre de ses livres, Loin des mosquées, très bien aussi.

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  4. J'ai adoré, c'est dur et poignant mais magnifique. Tout à fait d'accord avec toi sur les extraits de chansons dont je n'ai pas vu non plus l'intérêt, mais c'est mon seul tout petit bémol.

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