mercredi 2 janvier 2019

Les petits garçons


Théodore Bourdeau

Stock Arpège, 2019



Premier roman de l’auteur, Les petits garçons est aussi l’un des deux premiers opus actant la naissance de la toute nouvelle collection des éditions Stock, Arpège. Après Gallimard avec Sygne, une maison historique dont la réputation de haute tenue littéraire n’est plus à faire affiche clairement son ambition de chercher de nouvelles voix, de toucher peut-être un nouveau public sans sacrifier à la qualité des textes. A l’heure où l’on prétend que les gens ne lisent plus - ce que pour ma part je me refuse à croire et ce à quoi surtout je ne saurais me résigner - voici un bien excitant projet.
De l’aveu de sa directrice littéraire, Caroline Laurent - oui, il s’agit bien de la co-auteure du magnifique Et soudain, la liberté -, le projet de cette collection est de proposer des « romans d’apprentissage, des fresques familiales, des romans à caractère autobiographique, des romans noirs... Autant de notes distinctes qui se fondent dans une harmonie commune : celle d’une littérature française et francophone résolument romanesque.» 

Relatant le cheminement d’un jeune homme de sa plus tendre enfance à son entrée dans la vie active, le récit de Théodore Bourdeau s’inscrit clairement du côté du roman d’apprentissage. Issu des classes moyennes, le narrateur est un garçon sans éclat que les dispositions de son meilleur ami Grégoire ont tendance à éclipser aux yeux de tous. Tandis que Grégoire, fils d’un industriel fortuné, gravit sans peine les marches de l’institution scolaire pour finir par intégrer l’ENA et accomplir le destin qu’il s’est tracé, notre héros mène une existence de dilettante, se souciant davantage de l’éveil de sa vie sexuelle que de son avenir. Mais qu’il s’agisse de l’une ou de l’autre, il échoue à s’affirmer et à prétendre à une quelconque forme de «réussite».

Sur fond de climat social délétère, entre attentats, coupes bugétaires forcenées dans les entreprises, recherche effrénée de réduction des coûts et licenciements plus ou moins brutaux et massifs, les petits garçons deviendront néanmoins des hommes. Quoi qu’il leur en coûte et quelles que soient leurs désillusions, ils devront faire avec cette époque pour devenir pères à leur tour.

D’une lecture fluide et plaisante, ce roman met en scène avec légèreté et parfois avec humour un anti-héros de notre temps. Un agréable prélude à cette prometteuse collection !



16 commentaires:

  1. Bien aimé mais moins enthousiaste que toi. Je l'ai trouvé vraiment trop long à démarrer par contre j'ai trouvé la deuxième moitié très bonne.

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    1. Je suis en effet enthousiaste à l’idée que de jeunes éditeurs, dans des maisons bien installées, proposant des textes parfois pointus, soient à la recherche de nouvelles voix pour, notamment et espérons-le, donner envie de lire à un public plus jeune. La notion de plaisir est déterminante, et la ligne exprimée de cette collection est le romanesque. Avec une narration certes classique, de jeunes auteurs parlent de leur époque, d’expériences intimes dans lesquels les lecteurs peuvent se reconnaître, dans des textes qui se tiennent.
      Même si j’ai aussi envie de textes peut-être plus audacieux, notamment dans la forme, j’ai passé un agréable moment en compagnie de ces jeunes auteurs, et ça c’est toujours appréciable !

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  2. Je ne suis pas encore prête à me lancer dans les nouveautés de janvier, j'ai encore des découvertes à faire dans celle de septembre ! on verra plus tard.

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  3. Les premières notes de la symphonie de la rentrée, donc... :-) Je l'ai bien apprécié aussi ce roman, j'en parlerai un de ces jours.

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    1. Oui, j'ai vu que, pour l'heure, tu étais partie du côté de l'Amérique latine...

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  4. Comme Aifelle, j'ai encore bien du retard sur les rentrées précédentes, ce qui n'empêche pas d'avoir l'oeil ouvert. J'apprécie l'idée de cette nouvelle collection qui tourne le dos à l'autofiction. ;-)

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    1. Très clairement ! Ceci dit, personnellement, j'aime beaucoup l'autofiction (quand c'est bien fait)

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  5. Ce sera une de mes prochaines lectures... Wait and see !

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  6. Tu en parles très bien. Il se dégage de ce roman une belle délicatesse

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  7. C'est ma lecture en cours et j'apprécie pour l moment!

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    1. On ne devrait guère tarder à voir ta chronique, alors... ;-)

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  8. Arpège n'a plus de secret pour toi :) Celui-ci me tente davantage même si le thème semble avoir aussi été exploité plus d'une fois mais j'y suis plus sensible et j'en ai lu de bons avis avec le tien donc je suis vraiment curieuse de le lire.

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    1. Non, le thème n'est pas neuf en effet, mais trouver sa place dans un monde en mouvement, empreint d'une violence protéiforme ne va jamais de soi. Chaque génération se repose les mêmes questions, doit trouver ses propres réponses et se réinventer...
      J'ai eu la chance de pouvoir entendre l'auteur ce matin à la librairie Ici, et j'ai beaucoup aimé tout ce qu'il disait, qui était plein de finesse et de sincérité. Et puis il a les sens de l'autodérision, ce qui n'est pas pour me déplaire.

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