dimanche 21 octobre 2018

Le discours

Fabrice Caro

Gallimard, collection Sygne, 2018



17h56. Sonia vient enfin de lire le SMS qu'Adrien lui a envoyé 32 minutes plus tôt.

Coucou Sonia, j’espère que tu vas bien, bisous !

Tandis que sa mère et sa sœur Sophie s’affairent dans la cuisine à la préparation d’un dîner familial, Adrien, tout juste 40 ans, scrute fébrilement son téléphone dans l’attente d’une réponse. Après plusieurs semaines, il a craqué : il a rompu le silence qu'il s'était imposé après que Sonia lui avait déclaré avoir besoin d'une pause. 

Mais pourquoi ne lui répond-elle pas ? Et puis, qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Est-ce qu’on quitte la table en plein milieu d’un repas sous le prétexte d’avoir besoin d’une pause ? Qu’a-t-il bien pu faire de particulièrement pausifère ?
Les questions se bousculent. D’autant que c’est précisément le moment que Ludo, le compagnon de Sophie, choisit pour lui demander de prononcer un discours pour leur mariage. Un discours ? Il ne manquait plus que ça ! Il ne voit vraiment pas ce qu’il pourrait dire de cette sœur qui lui offre inlassablement chaque année à Noël une encyclopédie... 

Vous l’aurez compris, s’il part d’une situation plutôt dramatique, ce livre prend clairement le parti de l’humour. Et à en juger par le nombre de fois où j’ai éclaté de rire à sa lecture, Fabrice Claro le manie avec un talent certain !

Derrière cette posture se cache pourtant un malaise plus profond qu’il y paraît. L’envoi d’un simple message va cristalliser les doutes, les questionnements et les angoisses d’Adrien, en devenant le point de tension où viennent s’échouer ses échecs, ses frustrations et ses désirs.  

Adrien exprime sa difficulté à être au monde, à se délester du poids des conventions et des artifices que nous impose la vie en société pour être soi. Il sonde le vide existentiel que revêt parfois la vie et qu’il mesure à l’aune d’une échelle de Richter de l’absurdité.

Le texte est vif, alerte, parfaitement construit. Entre le début et la fin de ce roman, il ne s’écoule guère plus de trois ou quatre heures. D’un court chapitre à l’autre, les observations d’Adrien et les paroles échangées par les personnages se répondent et ressurgissent pour produire des effets de décalage hilarants, nous rendant le principal protagoniste toujours plus attachant.

J’étais curieuse de découvrir cette nouvelle collection, Sygne, qui nous promet d’apporter des «voix neuves» et «une façon inédite et captivante de voir le monde». Lancement réussi avec ce singulier récit de Fabrice Caro !



16 commentaires:

  1. Je suis curieuse de cette nouvelle collection, alors, pourquoi pas ?

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    1. Je pense que l'autre texte est très différent - et c'est heureux ! Mais franchement, celui-ci est de très bon augure. Ne te prive surtout pas de le découvrir !

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  2. Suis pas contre quelques éclats de rire... ni la découverte d'une nouvelle collection :-)

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  3. Si c'est Fabcaro, je me méfie ; j'ai abandonné Zaï zaï zaï, je n'ai pas accroché à sa forme d'humour.

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    1. Je n'ai pas (encore) lu Zaï zaï zaï zaï, mais d'après ce qu'on m'en a dit, c'est le même esprit, en effet. Personnellement, j'ai adoré. Mais l'humour, c'est très personnel...

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  4. ma curiosité est en alerte! je n'avais pas vu ce roman qui m'intrigue alors... je note

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  5. Je suis tellement fan de Fabcaro que je vais aller vers ce roman les yeux fermés (enfin pour le lire mieux vaudra les ouvrir mais tu a compris ce que je voulais dire^^).

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    1. Je vais te dire, le contraire m'aurait vraiment étonnée ! Je suis certaine que tu vas te régaler :-)

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  6. Je me réjouis de cette lecture que je prévois pour tout bientôt !!

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  7. si c'est Fabcaro, je dis "bien sûr"!!

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