jeudi 6 octobre 2016

Police

Hugo Boris

Grasset, 2016



Vingt-quatre heures de la vie d'une femme (flic)

Mais pourquoi diable ce roman m’a-t-il déçue ? Enfin, déçue… le mot est sans doute un peu fort. Peut-être serait-il plus juste de me demander pourquoi il m'a laissée indifférente. Il avait pourtant tout pour me plaire, à commencer bien sûr par son auteur, dont le précédent titre, Trois grands fauves, était rien moins qu’exceptionnel. Par son sujet, ensuite : bien ancré dans notre société, comme je les aime, avec un traitement plutôt pertinent. Jugez-en plutôt : une jeune femme flic, Virginie, est chargée avec deux de ses collègues de conduire un clandestin dans un avion qui le ramènera dans son pays, où il paraît peu probable qu’il réchappe à la torture et à la mort. Mais la femme s’interroge sur le bien-fondé de sa mission. Doit-elle exécuter les ordres ? N’a-t-elle pas le devoir de tout faire, au contraire, pour soustraire cet homme au destin qui l’attend ?

La question vaut d’être posée. Et chaque individu d’ailleurs, à son niveau, devrait sans doute s’interroger sur le rôle qu’il joue dans une chaîne dont il n’est qu’un maillon et sur les conséquences de ses actes. Que la réponse qu’apporte Hugo Boris par le truchement de ses personnages manque de crédibilité m’importe peu. J’accorde à la littérature un pouvoir d’imagination sans bornes. Non, ce que j’ai le plus regretté, je crois, c’est de n’avoir pas retrouvé cette plume précise et élégante, cette puissance d’évocation qui faisait la splendeur de son précédent livre et qui donnait à ses personnages une présence et une force incroyables.
Bien sûr, on ne parle pas de grands hommes des siècles passés comme on met en scène des personnages contemporains ; on ne met pas dans la bouche d’un orateur tel que Danton les mêmes mots que dans celle d’un inspecteur de police plutôt bas du front. Néanmoins, j’ai regretté que le style de Boris dans ce livre manque à ce point de relief et de saveur.

Et puis, j’avoue que les atermoiements des policiers m’ont modérément passionnée. J’aurais préféré que l’auteur y attache un peu moins d’importance pour se concentrer davantage sur le personnage du clandestin auquel il n’accorde finalement qu’assez peu d’attention. J’attendais qu’il se passe quelque chose entre cet homme et Virginie, et je suis restée un peu sur ma faim. C’est dommage, parce qu’Hugo Boris est un bel écrivain et parce que ce sujet méritait, pour moi, un peu plus de densité.



29 commentaires:

  1. Tu dois être le premier avis mitigé que je lis. De toute façon, il est dans ma PAL de proximité, donc je me ferai mon idée ;-)

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    1. C'est encore le mieux. Pour ma part, je n'ai pas encore lu d'avis dessus.

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  2. J'ai découvert l'auteur avec ce roman qui, tel quel, m'a bien plu (https://surmesbrizees.wordpress.com/2016/08/24/police-hugo-boris/).

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    1. Je crois pour ma part qu'après la lecture de Trois grands fauves, l'oeuvre pour moi d'un styliste hors pair, l'attente était trop grznde.

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  3. Tiens, c'est amusant... J'avais au contraire trouvé Trois grands fauves plutôt raté, car à mon avis trop ambitieux dans le propos pour Hugo Boris qui me semblait encore un peu "vert". Je l'ai trouvé bien plus à l'aise dans ce huis-clos qu'il mène extrêmement bien, je trouve, même si en effet le style aurait mérité un peu plus d'attention. En tout cas, comme je n'en attendais pas grand chose, je ne pouvais pas être déçu ! Et ce fut même, pour moi, une jolie surprise de cette rentrée.

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    1. Ah oui, c'est drôle en effet. En tout cas, une chose est à mettre au crédit de l'auteur : il sait se renouveler et se lancer dans des projets littéraires différents. Et ça, ça me plaît !

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  4. Quel dommage ! Ce titre me semblait prometteur par son caractère d'actualité pris sous un angle original (on fait rarement parler les policiers...)

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    1. C'est vrai, et c'est intéressant de ce point de vue-là. Mais en même temps, il me semble que le bouquin est trop bref, pas suffisamment étoffé pour être vraiment convaincant.

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  5. Eh bien, c'est plutôt le style qui m'a retenue dans le roman, l'histoire m'a semblé moins passionnante que "Trois grands fauves"... Je développerai dans un futur billet ! ;-)

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    1. Oui, j'ai hâte que tu m'apportes la contradiction, exemples à l'appui ;-)
      Dans Trois grands fauves, si j'avais voulu citer les plus belles phrases, je crois que j'aurais été en peine : tout le livre est magnifique ! J'ai vraiment eu l'impression de voir ces trois personnalités surgir devant moi tout au long de ma lecture.

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  6. Je ne l'avais pas retenu dans un premier temps, puis j'ai lu une chronique qui m'a donné envie... et à présent tu me fais l'effet inverse. On verra, si l'occasion se présente. Je n'ai pas lu Trois grands fauves et je vais peut-être réparer cette lacune plutôt...

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    1. Je te conseille vraiment cette lecture. D'autant que le livre est disponible en poche à présent...

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    2. ah tiens, je crois que c'est le 1er avis que je lis qui n'est pas dithyrambique !

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    3. Oui, je suis plutôt isolée, sur ce coup-là...

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  7. Je n'apprécie que modérément, et donc exceptionnellement les romans très ancrés dans notre société. Je n'ai jamais lu cet auteur, bien que "Je n'ai pas dansé depuis longtemps" soit sur mes étagères.

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    1. Pourtant, tu lis des choses qui le sont, même si c'est sous un angle très particulier. Je pense, notamment à Laetitia, ou La mésange et l'ogresse...

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  8. Une déception à la hauteur de tes attentes, ça arrive malheureusement.

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  9. Merci, merci, merci Delphine ! Il m'a sacrément déçue aussi ce roman, et je me sentais sacrément seule. Les atermoiements des policiers m'ont carrément agacée, et bien d'autres choses d'ailleurs.

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    1. Ah, Laure, toi aussi tu me réchauffes le coeur, parce que j'avais le même sentiment de solitude que toi ! Même si j'ai écrit cela avec quelque regret, ayant une réelle tendresse et un vrai intérêt pour cet écrivain.

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  10. Zut alors, le pitch de ce roman m'attire je dois dire...

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    1. Ben, en même temps, à part Laure et moi, il est plutôt apprécié, ce roman. Alors, s'il te fait envie, tente-le. Fais comme moi : je l'ai pris en bibli ;-)

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  11. Je n'étais pas à l'origine tentée ( ça m'arrive:).

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  12. J'entends beaucoup parler d'Hugo Boris dernièrement. Je ne l'ai encore jamais lu. Malheureusement, ça arrive ce genre de déception. Parfois, c'est qu'une question de timing...
    Bonne semaine Delphine

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    1. Oui, tu as raison, Nadine. Parfois on ne lit pas certains livres au meilleur moment. Et c'est vrai que ces temps-ci, je ne suis pas super disponible... Bonne semaine à toi également.

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  13. Je ne connais pas du tout cet auteur. Bon, ben, si je comprends bien, mieux vaut ne pas commencer par celui-ci. C'est toujours un peu dommage quand un auteur ne confirme pas notre attente surtout sur le plan de la qualité d'écriture.

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    1. A vrai dire, je suis assez seule à ne pas avoir été séduite par ce roman. Nombreux sont les lecteurs qui l'ont beaucoup aimé… C'est une appréciation très personnelle.
      En tout cas, je suis ravie de te revoir par ici !

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    2. Merci ! Qu'est-ce que ça me frustre cette année de ne pas pouvoir lire et suivre la blogosphère autant que je veux...Je me rattrape un peu pendant les vacances mais bon...

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