vendredi 26 juillet 2013

Luz ou le temps sauvage

Elsa Osorio

Métailié, 2000


Traduit de l'espagnol (Argentine) par François Gaudry


Bénéficiant d’un suspens haletant, ce roman revient avec brio sur l’un des épisodes les plus noirs de l’histoire de l’Argentine.



Rares sont les livres qui sont à la fois aussi émouvants, aussi captivants et aussi intéressants que celui-ci. A travers le destin d'une jeune femme, c'est la part la plus noire de l'histoire de l'Argentine qui est retracée, à l'époque de la dictature militaire, quand régnaient la répression féroce, la terreur et la torture.

Luz Iturbe fait partie de ces bébés qui ont été enlevés à leur mère aussitôt après leur naissance, tandis que celle-ci était assassinée. Elsa Osorio réussit à construire une trame romanesque d'une redoutable efficacité, et l'on suit sans relâche le parcours effectué par Luz , devenue adulte, et les différents protagonistes de l'histoire dans cette quête identitaire pour retrouver ses racines. C'est avec beaucoup de finesse qu'elle trace le portrait des différents héros, montrant ainsi les diverses attitudes qu'un individu est susceptible d'adopter face aux événements : à côté de ceux qui se battent pour tenter d’infléchir le cours des événements, il y a tous ceux qui ferment les yeux pour que le fragile équilibre de leur univers personnel subsiste.

Il en est ainsi de Mariana, la mère «adoptive» de Luz qui, si elle est d’abord victime du mensonge de son entourage, continuera toujours d’idolâtrer son père, le bourreau qu’est le général Dufau, même lorsqu’elle apprendra la vérité sur sa fille.
Quant à Eduardo, son mari, il préfère également fermer les yeux sur la véritable destinée de sa fille par amour pour Mariana.
Il y a enfin Miriam Lopez qui choisit d’ignorer les activités de son mari, l’odieux Piloti, le tortionnaire du régime surnommé La Bête.

Elsa Osorio brosse un tableau réaliste, avec une infinie sensibilité, loin de tout manichéisme. En même temps, elle touche à des questions essentielles, qui concernent tout un chacun, celles de l'identité, de la filiation, de la relation qui unit les êtres au sein d'une famille, et de l'amour.
Ce livre haletant, qu'on peine à refermer avant d'en lire la dernière ligne, touche et émeut au plus haut point. A lire absolument !


Article rédigé en 2013, à l'aide de notes prises au moment de la lecture du roman, en 2000

7 commentaires:

  1. Merci pour cette découverte. J'apprécie un blog comme le tien qui ne fait pas que "courir" après l'actualité. Quand on sait que la durée de vie d'un livre en librairie est de 6 mois il est important de les soutenir le temps qu'il faut.
    J'ai vu aussi que tu chroniques les Heures souterraines après Rien ne s'oppose à la nuit. Je te recommande la lecture de No et moi pour compléter la trilogie de Vigan.

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  2. Ah, ça me touche beaucoup ! J'ai en effet à coeur de défendre les livres que j'ai aimés, et c'est toujours une joie pour moi de pouvoir partager ces lectures.
    Quant à Delphine de Vigan, je ne compte en effet pas en rester là avec elle !
    A bientôt sur nos blogs respectifs !

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  3. Il fait partie des livres qui m'ont marquée durablement !

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  4. Tout comme moi alors ! C'est pour ça que j'ai voulu initier mon blog avec notamment ce livre, lu pourtant il y a des années (je crois qu'il date du siècle dernier !!!) Et dans ce cas, je te recommanderais bien deux autres romans tout aussi chers à mon coeur : Je n'ai pas peur de Niccolo Ammaniti et Le sourire étrusque de Jose Luis Sampedro (également chroniqués ici). A moins que tu ne les aies lus également ?

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  5. Non mais j'avais déjà noté Le sourire Etrusque, je note l'autre aussi du coup...

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  6. Très jolie chronique, particulièrement attractive. Je me souviens d'une lecture sur le même sujet : "Mapuche" de Caryl FEREY, je crois que je vais rechuter Delphine... pour mon plus grand plaisir !

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